EAN13
9782012585973
Éditeur
Hachette BNF
Date de publication
1 juin 2012
Collection
Histoire
Nombre de pages
595
Dimensions
23,4 x 15,6 x 3 cm
Poids
825 g
Langue
fre

Marseille À La Fin De L'Ancien Régime , (Éd.1896)

Collectif

Hachette BNF

Prix public : 33,00 €

« Avant d'examiner la constitution de Marseille à la fin de l'Ancien Régime, de rechercher les conditions de la vie qui lui était propre, il y a lieu de déterminer l'importance que notre ville avait alors par elle-même, en dehors de son rôle politique. Nous rappellerons, à cet effet, sa position géographique et les avantages que cette situation a, de tout temps, assurés a son commerce et a son industrie. Nous observerons les transformations progressives de son port, les accroissements de la ville, les limites de son territoire et le développement de ses agglomérations rurales. Nous noterons encore, très rapidement, le mouvement de la population, depuis le commencement de notre ère jusqu'au temps présent.   Marseille est située au pied des premières ramifications du versant occidental des Alpes, dans une baie large et profonde ouverte sur le golfe du Lion, à dix lieues de la bouche du Grand-Rhône. Indépendamment des agréments qui naissaient d'un sol accidenté et varié, du voisinage immédiat de plusieurs petits cours d'eau, de la douceur du climat, d'un ciel presque aussi pur que celui de l'Orient, cette situation judicieusement choisie par les chefs de l'expédition qui, au dire de Justin, précéda et détermina l'émigration des Phocéens, eut peut-être aussi à assurer le développement de leur colonie. Les émigrants s'y trouvèrent à égale proximité de l'Espagne, dont les côtes n'avaient encore été explorées que par les Carthaginois et les Phéniciens, et de l'Italie, où commençait à s'étendre le peuple conquérant avec lequel, au rapport du même historien, ils venaient de contracter alliance ; non loin de la Corse, de la Sardaigne et de l'Afrique occidentale. Au couchant, comme au levant, des plages abritées et d'excellentes calanques, échelonnées le long de leur rivage, s'offraient comme autant d'abris à ceux de leurs navires qui ne devaient pas s'éloigner de la terre ferme. Leur rade, défendue contre les flots de la haute mer par une série de petites îles, “ce lieu où”, suivant l'expression de Montesquieu, “les vents, les bancs de la mer, la disposition des côtes ordonnent de toucher”, ne pouvait qu'attirer les barques étrangères qui venaient dans ces parages. D'autre part, la vallée du Rhône, dont ils s'étaient rapprochée le plus qu'ils avaient pu, leur ouvrait, à l'intérieur de la Gaule, ces voies de communication naturelles dont l'heureuse disposition a si vivement frappé l'esprit profond de Strabon. “Ce qui mérite surtout d'être remarqué dans cette contrée”, fait-il observer dans un passage où se retrouve l'empreinte de son génie, “c'est la parfaite correspondance qui règne entre ces divers cantons, par les fleuves qui les arrosent et par les deux mers (l'Océan et la Méditerranée) dans lesquelles ces derniers se jettent ; correspondance qui, si l'on y fait attention, constitue en grande partie l'excellence de ce pays, par la grande facilité qu'elle donne aux habitants de communiquer les uns avec les autres, et de se procurer réciproquement tous les secours et toutes les choses nécessaires à la vie. Cet avantage devient surtout sensible en ce moment où, jouissant du loisir de la paix, ils s'appliquent à cultiver la terre avec plus de soin et se civilisent de plus en plus. Une si heureuse disposition des lieux, par cela même qu'elle semble être l'ouvrage d'un être intelligent plutôt que l'effet du hasard, suffirait pour prouver la Providence. Ainsi on peut remonter le Rhône bien haut avec de grosses cargaisons qu'on transporte en divers endroits du pays par le moyen d'autres fleuves navigables qu'il reçoit, et qui peuvent également porter des bateaux pesamment chargés. Ces bateaux passent du Rhône sur la Saône, et ensuite sur le Doubs, qui se décharge dans ce dernier fleuve : de là les marchandises sont charriées par terre jusqu'à la Seine qui les porte à l'Océan à travers le pays des Lexoviens et des Galètes, distant de l'Ile de Bretagne de moins d'une journée.” Marseille s'est trouvée assez bien placée pour accaparer la plupart de ces débouchés éloignés. D'autres villes du même littoral ont pu, il est vrai, les lui disputer quelque temps, avec plus ou moins de succès ; mais, par un surcroît d'heureuse fortune pour Marseille, elles n'avaient pas aussi bien choisi leur emplacement. Établies près des estuaires, sur des côtes livrées aux envahissements des sables, elles ont vu, peu à peu, leurs ports se combler, la mer s'éloigner de leurs murs. Quant aux autres rivages de la Méditerranée, tout au moins dans tout l'ouest, ainsi que Strabon nous l'a donné à penser, ce serait en vain que l'on y chercherait des avantages semblables à ceux qu'il a observés dans la correspondance de nos fleuves. Le littoral espagnol ne dispose que de quelques vallées relativement peu considérables, sans communication naturelle avec les régions centrales de l'Europe. Les places commerciales de l'Italie s'échelonnent le long d'une chaîne ininterrompue qui leur barre la route vers le nord. Il en est de même des ports septentrionaux de l'Adriatique. Seule, dans l'étendue que nous venons d'indiquer, Carthage pourrait, peut-être, être considérée comme ayant eu, sur son continent, une situation comparable à celle de Marseille. Encore, ainsi que M. Pardessus l'a fait remarquer en développant l'observation de Strabon, ce rapprochement serait-il à l'avantage de notre ville. “La Gaule et les vastes contrées qui en sont limitrophes étaient peuplées, fertiles, et les communications de Marseille avec les habitants n'étaient pas arrêtées par des difficultés que Carthage éprouvait pour pénétrer dans l'intérieur de l'Afrique.” Grâce à ces circonstances presque exclusivement géographiques, le principal courant commercial de la Méditerranée s'est porté du Levant vers le nord-ouest de l'Europe, en passant par notre port. Marseille est devenue, pour les marchandises de l'Asie-Mineure, de la Grèce, de l'Égypte et même de la Perse et des Indes, aussi bien que pour les produits des Iles Britanniques, un lieu de transit et d'échange obligé. Les étroites affinités d'intérêts qui rattachent la production au trafic en ont ensuite fait un centre industriel de plus en plus actif. La double importance qu'elle a ainsi acquise a été soumise à bien des épreuves. Nous rappellerons seulement les entraves que les Romains, eux-mêmes, ont essayé, sur le tard, d'apporter aux développements de leur ancienne alliée, après lui avoir donné l'appui de leurs flottes et de leurs légions ; les invasions et les pillages qu'elle a eus à subir de la part des Visigoths, des Bourguignons, des Ostrogoths, des Lombards et des Sarrasins ; l'occupation des ports du Levant par les Arabes ; l'hostilité mal déguisée des empereurs de Constantinople, entièrement gagnés à la cause des Génois et des Vénitiens ; enfin, les fléaux de toute sorte qui ont si souvent frappé notre ville. La vitalité dont Marseille a fait preuve, au milieu de ses crises et de ses difficultés, semblerait devoir donner la certitude qu'elle conservera indéfiniment sa supériorité sur ses rivales. On connaît cependant les tentatives qui se poursuivent, depuis quelques années, de la mer du Nord à l'Archipel et à l'Adriatique, pour faire reporter dans ces directions la voie commerciale qui a été le premier élément de sa prospérité. Ces efforts atteindront-ils jamais leur but ? Les percées du Simplon, du Brenner et du Saint-Gothard, le raccordement du chemin de fer de Salonique avec le réseau allemand, la prodigieuse transformation des installations maritimes d'Anvers et de Hambourg, d'autres grands travaux à l'état de projet ou en voie d'exécution parviendront-ils à déplacer les voies de communication normales entre la Méditerranée et l'Océan ? Il est permis d'en douter, avec les autorités les plus compétentes. Au surplus, à l'époque sur laquelle nous devons nous arrêter, sur le déclin du dernier siècle, les éventualités qui inspirent aujourd'hui, à une partie du commerce marseillais, des alarmes plus ou moins vives, n'étaient pas même à prévoir. Dans tout l'occident de l'Europe, aussi bien que dans la région méditerranéenne qui a été si longtemps son domaine, Marseille n'avait alors à redouter, de longtemps encore, aucune concurrence sérieuse. Avec un ...
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