Prix public : 9,20 €
Dans le monde juif, la souffrance, ses représentations et sa ritualisation ont façonné au fil des siècles l’histoire d’un peuple et d’une religion, et plus encore l’idée que ce peuple se faisait de son histoire. Ce livre en suit dans la longue durée les méandres. Il y situe l’événement traumatique qu’a été la Shoah, venu réactiver une mémoire « lacrymale » dès lors jamais apaisée. Et Esther Benbassa analyse le lien indissoluble qui s’est finalement tissé entre le génocide et l’Etat d’Israël, sa politisation et sa transformation en une religion civile accessible à tous, un judaïsme « de l’Holocauste et de la Rédemption » la Rédemption étant la création d’un Etat juif lui-même sacralisé. Au-delà du cas juif, ce livre fournit des clés de compréhension des diverses trajectoires mémorielles et identitaires d’aujourd’hui, aussi nécessaires ou inévitables qu’envahissantes et dont la mémoire du génocide est devenue le modèle. Cet usage de la souffrance comme identité engendre des devoirs de mémoire tyranniques, auxquels Esther Benbassa oppose le droit à un raisonnable oubli qui ne serait pas amnésie, mais confierait à une histoire enfin plurielle et partagée le dépôt de nos passés de souffrances.