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Au début des années 1980, de dévoués journalistes se sont donné pour mission de faciliter l’« entrée du capitalisme dans la gauche ». Par une heureuse coïncidence, cette aspiration correspondait très exactement avec celles des « socialistes » de gouvernement, qui ambitionnaient alors de rompre avec… le socialisme. Ce reniement requérait un solide travail de « pédagogie », où le quotidien Libération prit par exemple toute sa part en confectionnant dès 1984, avec la complicité de l’ancien communiste Yves Montand et pour accompagner la stupéfiante émission « Vive la crise ! », un hors-série d’anthologie où se trouvait l’essentiel de ce qui allait fonder, pour trente ans, le discours de la presse dominante. Trois décennies plus tard, l’édifice idéologique ainsi construit n’en finit plus de s’effondrer dans la crise. Cette dislocation aurait pu inciter ces (obstinés) forgerons du consentement à plus de modestie. Mais les pontifes du temps ont ceci de particulier qu’ils ne connaissent pas la honte. Confrontés aux effets concrets de leurs prédications, ils concèdent parfois (mieux vaut tard que jamais) qu’il conviendrait d’« humaniser » un peu les marchés, mais c’est pour mieux répéter que l’unique façon de remédier à la crise du capitalisme est d’opter pour toujours plus… de capitalisme. Sébastien Fontenelle est journaliste. Derniers ouvrages parus : Les Éditocrates ou Comment parler de (presque) tout en racontant (vraiment) n'importe quoi (collectif, La Découverte, 2009), Même pas drôle. Philippe Val de Charlie Hebdo à Sarkozy (Libertalia, 2010).