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Depuis une dizaine d'années, la montée en puissance du thème des " inégalités sociales et territoriales de santé " est repérable à la fois dans l'action publique et dans la recherche en sciences sociales. Paradoxalement, les inégalités de santé et les pratiques discriminatoires sont pourtant rarement réfléchies en termes de rapports de domination entre classes sociales, et a fortiori dans leur articulation avec d'autres rapports de domination (de sexe, de race, d'âge notamment). Si l'épidémie de Covid-19 a pu être analysée comme une " épidémie de classe " et, plus timidement, comme un révélateur des inégalités raciales, les questions de santé restent rarement lues sous cet angle, y compris lors des crises sanitaires majeures des dernières années. Ce numéro poursuit l'analyse des logiques de production et de reproduction des inégalités et de cumul des discriminations en matière de santé à l'aune de ces rapports de pouvoir, déjà explorée dans le n° 236-237 d'avril dernier. Dans ce numéro-ci, on mobilise des enquêtes portant sur le traitement des patient.e.s dit.e.s " roms " par la médecine urgentiste, la santé des travailleur.se.s des " très petites entreprises " et enfin la critique du pouvoir médical dans les pratiques et politiques de santé en banlieue parisienne populaire. Pour cela, les autrices mobilisent la sociologie des rapports sociaux, la sociologie du travail et la sociologie de l'action publique. À l'heure où l'épidémie de Covid-19 voit se multiplier, dans des proportions comparables à ce qu'avait produit l'épidémie de sida, les recherches incluant les sciences sociales à titre de supplément d'âme de la recherche biomédicale, ce dossier renverse la perspective et fait de la santé un objet de sociologie critique.