Prix public : 19,00 €
Une comédie, surgie de la narration d'un rêve que fait un poète timide à un producteur de radio, est-elle apte à assumer la cause de nos libertés menacées ? - Et, par ailleurs, pouvons-nous encore prétendre situer le danger dans les zones d'un quotidien considéré comme banal ?... Pour une part oui, si l'agression du silence et l'anéantissement du monde intérieur sont bien le fait du monstre balourd qu'est parfois la Radio. Devons-nous tenter une défense ? Vauthier le croit et le démontre par le biais d'une bouffonnerie qui lui est familière. Mais, lyrique avant tout, l'auteur du Personnage combattant, des Prodiges, ne s'est pas renié ; il a chargé son héros (Georges, le Rêveur) d'une abondance verbale justement poétique et ici préméditée. Pour oser son attaque, habilement il accable son porte-parole. Le détenteur de la vérité sera bafoué, non seulement par les autres personnages de la pièce, mais par l'auteur lui-même. Georges, dès lors, apparaît comme un fâcheux et un hypocrite ingénu. Le Rêveur est une pièce savante. Trois thèmes s'y marient : l'offrande par Georges de sa vérité, c'est-à-dire de son rêve, avec, en contrepoint, le prosaïsme d'une intrigue esquissée entre le Rêveur et la femme de son ami Simon, action fuguée que l'aventure extra-conjugale du «producteur» met en rupture constante. Vauthier tient bien les ficelles de sa comédie et le rêve de Georges, rêve narré sans vergogne jusqu'à des recommencements «insupportables», ne sert finalement - ô dérision - qu'à une stratégie amoureuse aussi perfide que comique : étirer le temps jusqu'à faire échouer l'adultère dont Laurette, douce amie de Georges et épouse de Simon, allait être la victime. C'est tout ce que récolte, apparemment, le héros peu viril et pur malgré tout de cette aventure qui pourrait aussi s'intituler «Dans la gueule du loup». Nouvelle édition en 1979