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Les marginaux n'ont pas toujours existé. Longtemps, le pauvre, le vagabond, le truand - grand ou petit - a été accepté par la société, qui le reconnaissait - et le punissait - comme tel. Les choses changent à la fin du Moyen Âge. Le travail devient la valeur sociale fondamentale des sociétés européennes. Ceux qui ne vivent pas de leur travail sont désormais des asociaux, «inutiles au monde» : il faut donc les enfermer ou les mettre au travail forcé, car leur existence même défie l'ordre social. Ils deviennent alors des marginaux et s'organisent de façon autonome aux frontières de la société régulière, en bandes ou en cours des miracles que de nombreux textes médiévaux et du XVIᵉ siècle nous décrivent. C'est le monde de la marginalité et l'histoire de sa progressive exclusion que décrit Bronislaw Geremek. Vagabonds, mendiants et pauvres étaient des figures habituelles de la société médiévale. Mais aux derniers siècles du Moyen Âge et aux débuts de l'âge moderne, leur statut se modifie : des controverses doctrinales au sein de la religion réformée comme de la Réforme catholique disputent désormais des vertus d'une vie de misère et de l'aumône qui permettrait aux nantis de racheter à bon compte leurs péchés ; l'administration des hôpitaux et de l'aumône est centralisée : le vagabondage devient la source de nouvelles peurs sociales - celles d'épidémies mais aussi des menaces que font peser ces existences hors d'une société raffermie d'ordres et de corporations. Vagabonds, mendiants et pauvres sont refoulés aux marges d'un monde où le travail devient la valeur fondamentale : ils seront à l'avenir des marginaux, poids «inutiles au monde». Archives criminelles et miroirs de gueuserie, ordonnances et lettres de rémission racontent les vies exemplaires de ces hommes dont la seule existence hante désormais les nantis et les gouvernants. Édition revue Édition revue.