Prix public : 20,00 €
Pour un écrivain comme Philip Roth, réputé nourrir ses romans de sa propre substance, en revenir aux faits permet de faire le point, de démêler le vrai du faux, de se rendre, finalement, visible à soi-même. Car, si la fiction personnalise l'expérience, l'autobiographie la personnifie. Mais il ne s'agit pas, chez Roth, d'autobiographie candide : l'imagination est encore et toujours au pouvoir, qui préside au choix des faits et à la perspective où ils sont vus. La question pourrait bien être, ici : comment devient-on l'auteur de Portnoy, le créateur de Kepesh, Tarnopol et autres Zuckerman ? Les épisodes choisis sont en effet ceux mêmes qui ont façonné l'écrivain, l'écrivain qui offre à ses personnages, à son personnage essentiel, ces éléments d'autobiographie, et qui en reçoit, pour finir, une volée de bois vert. Car, si d'en revenir aux faits marque une révolte de l'écrivain contre ses personnages, les personnages aussi se révoltent contre l'écrivain : «Qui sommes-nous d'ailleurs ? questionne Zuckerman. Ton autobiographie ne nous apprend rien de ce qui, dans ta vie, nous a fait surgir de toi.» Pourtant, c'est là tout le sujet des Faits : ce qui, dans la vie de Roth, conduit à Portnoy et à Zuckerman ; ce qui, dans l'ordinaire d'une vie, conduit à l'extraordinaire de la création.