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Le temps est la matière vive de l'Histoire, que l'on s'attache de longue date à découper et à périodiser. Ainsi sont nés les époques, les périodes ou les âges de notre histoire. À ces "divisions imaginaires du temps", selon l'expression de Charles Seignobos, les historiens ont consacré de nombreux et importants travaux. Un aspect est demeuré cependant en retrait : celui qui a trait aux noms et dénominations de ces époques. On ne s'est en effet jamais contenté de "découper l'Histoire en tranches", on l'a dotée d'une kyrielle de noms propres - de "Moyen Âge" à "Belle Époque", de "Renaissance" à "Ancien Régime" -, qui pèsent sur la compréhension du passé. Car nommer n'est jamais neutre. La désignation d'une période charrie avec elle tout un imaginaire, une théâtralité, voire une dramaturgie qui viennent en gauchir l'historicité, et donc la signification. Élucider les noms d'époque - les linguistes disent "chrononymes" - constitue donc une opération essentielle pour qui souhaite envisager le passé sans anachronisme ni faux-semblants. C'est à cette entreprise que ce livre est consacré. Les quatorze essais qui le composent s'attachent à quatorze "noms d'époque" du contemporain, choisis parmi les plus usuels, en France comme à l'étranger. L'enquête débute au lendemain de la Révolution française, qui a échoué à réordonner le temps, mais réussi à le bouleverser. Elle s'achève dans les dernières années du XXᵉ siècle. Entre-temps se dévoilera une large partie de l'histoire contemporaine, du "Risorgimento" à la "Fin de siècle", du "Gilded Age" aux "Trente Glorieuses", des "Années folles" aux "années noires".