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À l'heure où s'achève le centenaire de la Première Guerre mondiale, deux historiens se penchent sur le destin d'une petite fille extraordinaire née en 1908 dans une famille de la grande bourgeoisie parisienne. Cette petite fille, c'est Françoise Marette, «Vava» pour les intimes, et elle deviendra Françoise Dolto, la psychanalyste qui a changé le regard que nous portons sur l'enfance. Comme beaucoup d'enfants nés peu avant le conflit, Françoise vit la guerre de loin, repliée à Deauville en compagnie de ses frères et sœur et de leur gouvernante. À six ans, déjà épistolière de talent, elle multiplie les missives à tous les membres de sa famille. Ainsi, dit Manon Pignot, historienne de l'enfance, dans sa délicate analyse, «la guerre a fourni à cette petite fille incroyablement curieuse un contexte inattendu d'expression et d'intelligibilité du monde» qui est à l'origine de sa vision révolutionnaire de l'enfance. L'implication de l'enfant s'intensifie quand elle entretient avec Pierre Demmler, son oncle de vingt-huit ans, une intense correspondance et se considère, encouragée par la famille, comme la fiancée et la future épouse du jeune capitaine. La mort au front, le 10 juillet 1916, de Pierre Demmler, fait de la jeune promise «une veuve de guerre à sept ans». Yann Potin, en historien et analyste des archives familiales, ouvre pour nous enveloppes et albums conservés par Françoise et la famille, interroge «la manière dont le deuil se cristallise, se fixe sur le papier, par les images, mais aussi se transmet malgré nous, par le truchement de la vie matérielle propre d'autant de petits reliquaires affectifs». Ainsi, l'expérience enfantine de la Grande Guerre a vraisemblablement nourri la pensée révolutionnaire de Françoise Dolto psychanalyste quand il s'est agi, plus tard, de soigner des enfants.