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Au début, on pouvait croire à une mode passagère. Et puis la vogue est devenue lame de fond : aujourd’hui, l’amour de la philosophie constitue une passion partagée. Comme si notre société renouait avec une promesse des Lumières, que Diderot résumait ainsi : «Hâtons-nous de rendre la philosophie populaire !» Voilà pourquoi on lira ici une réflexion critique : en effet, l’espérance de la «philo pour tous» menace sans cesse de nourrir le marketing démagogique du «développement personnel». Une réflexion politique attentive au genre, aussi, car bien que la pensée n’ait pas de sexe, le masculin l’emporte dans l’image commune que l’on se fait du «philosophe». Une réflexion pédagogique et paradoxale : si philosopher, c’est «penser par soi-même», ce geste autonome peut-il s’en remettre à une parole enseignante ? Une réflexion historique et culturelle, enfin, car il faut se demander ce qu’il en est de la philosophie ailleurs qu’en Occident. La pratique de la philosophie nous amène à nous défaire de nos certitudes et à nous bricoler une éthique en actes, qui nous permet de tenir bon, de nous tenir bien : apprendre à philosopher, c’est apprendre à être libre. Voilà une urgence collective et un impératif pour tous.