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La seule femme de sa famille : voilà comment le comte de Viel-Castel, intime de la Princesse, définissait Mathilde, nièce de l'Empereur, son portrait au féminin, et l'originale du clan. Bonaparte et princesse jusqu'au bout des ongles, la fille du roi de Westphalie ne démordit jamais de son culte pour Napoléon ; et c'est peut-être à son oncle qu'elle doit ce caractère ombrageux, ce goût des répliques bien senties qui faisaient les délices de ses contemporains. Mariée à vingt ans au prince Demidoff, un dandy richissime mais qui se révèle syphilitique et violent, elle choisit l'indépendance dès 1846, obtenant au passage une avantageuse séparation : beaucoup d'argent, un cousin haut placé (Napoléon III), de la beauté, un tempérament passionné la font bientôt la femme la plus en vue du Second Empire. Dans son salon fastueux de la rue de Courcelles, elle accueille les Goncourt, Flaubert, Théophile Gautier, Dumas et tant d'autres, fait les académiciens et les sénateurs, et prend pour amant le plus bel homme du siècle, le surintendant des Beaux-Arts Nieuwerkerke. À la chute de l'Empire, elle s'enfuit, mais revient à Paris dès 1871, recréant autour d'elle une cour de fidèles, que fréquentent le jeune Proust, Robert de Montesquiou, Mme Straus, les Daudet... Elle s'éteint en 1904, suscitant une émotion nationale, elle, la nièce de Napoléon, celle qui avait eu ce mot, quand son neveu Louis se disait tenté par la carrière des armes : «ce n'est pas une raison, parce que tu as eu un militaire dans la famille...»