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Plus de deux cent mille morts, côté algérien, près de trente mille morts, côté français: telle fut l'issue sanglante de la guerre d'Algérie. Cette guerre meurtrière, qui a longtemps tu son nom, fut aussi extrêmement coûteuse: elle a représenté 20% du budget de l'État pour la seule année 1959. Fallait-il que les enjeux soient considérables pour que la France manifeste, si longtemps, un tel attachement! Or ce livre démontre qu'il n'en fut rien, mettant à mal, au passage, bien des idées reçues: dès le début des années trente, l'Algérie connaît une crise qui ira s'aggravant jusqu'à son indépendance, et représente un fardeau toujours plus lourd pour la métropole. Les ressources sont insuffisantes pour nourrir une population qui croît très vite, car l'Algérie n'est pas ce pays richement doté par la nature qu'on s'est longtemps plu à imaginer; la misère s'étend, les Algériens sont, très tôt, contraints de s'expatrier pour nourrir leurs familles - et non parce que la France fait appel à eux pour se reconstruire après 1945. Cette crise, aucune mesure n'a pu la juguler, ni les tentatives pour industrialiser la colonie avant la guerre, ni le plan de Constantine décidé en 1958. Quant à la découverte des hydrocarbures du Sahara, elle fut loin de représenter la manne qui aurait avivé la cupidité de la puissance coloniale... Analysant les relations complexes et changeantes entre les acteurs de la colonisation - État, organismes patronaux, entreprises, citoyens -, Daniel Lefeuvre propose une histoire nuancée et critique de ce pan tragique de notre passé colonial, au risque de heurter les partisans de la commémoration nostalgique comme les tenants d'une «repentance» mal entendue. En couverture: A. L. Mercier, Algérie, pays de la qualité, affiche. Office algérien d'action économique et touristique, Gouvernement général de l'Algérie, vers 1950 (MHC-BDIC).