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La liberté d’expression, dit la doxa, est un privilège démocratique. Dans ces conditions, la création d’une chaîne d’information internationale pluraliste dans une pétromonarchie de la péninsule arabique laisse perplexe. Pourtant la plus populaire des chaînes d’information arabe s’est rapidement révélée plus professionnelle et moins docile que ses concurrentes occidentales, au point de devenir une source d’information incontournable sur la scène internationale. Comment expliquer qu’Al Jazeera se soit affirmée comme un espace de liberté alors même qu’elle était dépendante financièrement et administrativement de la famille régnante du Qatar ? Comment interpréter la création par l’Etat d’un média fondé sur la liberté d’opinion dans un système politique dominé par une oligarchie tribale où les institutions démocratiques n’existaient pas encore? Plus de dix ans après le lancement d’Al Jazeera, ces paradoxes sont restés largement irrésolus. La diffusion d’enregistrements vidéo d’Al-Qaeda par une chaîne située à quelques dizaines de kilomètres du Commandement Central Américain restera à cet égard dans les annales des « mystères » dignes des mille et une nuits. Ce travail précurseur est une réflexion sur l’émergence d’un discours pluraliste dans un régime non-représentatif. Il montre comment, au sein d’une configuration tribale, s’est dégagée une possibilité de discours dont la pertinence a su concurrencer les normes régissant la production de l’information dans le journalisme occidental.