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Rousseau a été souvent lu comme un auteur indifférent à l'action, essentiellement tourné vers la cri-tique des sociétés existantes. Il est vrai qu'il ne conçoit pas l'action dans la perspective d'un progrès histo-rique. Passé un point pour lui déjà atteint par les sociétés modernes, la tendance au déclin est certaine. Mais Rousseau s'est aussi posé la question de la possibilité de freiner le déclin, voire de remonter la pente si les circonstances s'y prêtent, au moins pour un temps. Il a lui-même conçu comme une façon d'agir l'écriture d'ouvrages sur la politique et l'histoire. Sa réflexion sur l'action est pour nous d'une actualité certaine, à une époque où la notion de progrès historique est interrogée. Dans cette étude, Patrice Canivez réexamine les rapports entre histoire et politique dans l'ensemble du corpus rousseauiste. Ce réexamen s'impose aussi en raison des avancées récentes de la recherche sur les manuscrits du philosophe et l'interprétation de ses textes. L'auteur établit le lien entre la théorie de l'histoire humaine développée par Rousseau et sa conception de la narrativité historique. Il tâche de saisir l'unité de sa pensée au travers des divergences entre ses textes, une unité qui s'exprime non pas malgré la pluralité des textes, mais par le biais de cette pluralité. Il révèle comment les variations d'un texte à l'autre permettent à Rousseau d'appréhender une réalité historique et politique essentiellement ambivalente.