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« L'orateur athénien Hypéride est un des destinataires et dédicataires du discours ininterrompu d'un narrateur changeant, avocat parcourant la province russe pour aller plaider la défense de mères infanticides, magistrat enquêteur qui égrène la triste litanie des cruautés, avortements, empoisonnements et vilenies de tout poil dont la nature humaine en général, russe en particulier, est capable. Les glissements géographiques répondent dans la trame de ce texte aux glissements historiques. Les dieux païens slaves sillonnent les prétoires soviétiques, la Volga se jette dans l'Hyrcanie antique, la «fenêtre russe» ouverte sur l'Europe ne crée qu'un gigantesque courant d'air, et l'on rejoue sans fin la Mouette de Tchekhov devant un parterre embrumé par les rhumes et les délires : on retrouve là l'étonnement inépuisable des voyageurs devant les caprices calligraphiques de la vie russe. «C'est comme la même enquête criminelle qui est reprise dix fois, vécue par dix personnages, hommes ou femmes, effleurés par le bâton magique de la poésie de Mikhaïl Chichkine. Sommes-nous en compagnie d'un géographe allemand qui enquête sur les Samoyèdes, ou bien de Moïse tentant d'arracher son peuple à Pharaon ? L'auteur, au final, est aussi perdu que nous, mis K.O. par la vie russe, mais sauvé par les mots, et leur conspiration. » Georges Nivat. L'écrivain russe Mikhaïl Chichkine vit en Suisse. La Prise d'Izmail, son premier roman, a obtenu le Booker Prize russe en décembre 2000.