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Existe-t-il un pays où l’on peut tout dire sans encourir de sanctions judiciaires ? Pour nous Européens, les États-Unis apparaissent comme cette terre promise où chacun est libre de s’exprimer sans entraves. Pourtant, en dépit de la puissance qu’y a acquise la liberté d’expression, on ne peut pas tout dire outre-Atlantique. Certes, dans le domaine des opinions politiques ou des questions dites d’intérêt général, les Américains se montrent les dignes héritiers des Lumières. Mais quand il s’agit de messages à contenu sexuel, ils se révèlent bien plus répressifs que les Européens : comment expliquer autrement qu’on puisse brûler la bannière étoilée mais qu’il soit interdit de prononcer le mot « fuck » à la télévision pendant les heures de grande écoute ? À travers une analyse passionnante des arrêts de la Cour suprême, Marcela Iacub explique avec brio ce double phénomène de libéralisation absolue de la parole politique et de répression des messages à contenu sexuel. Elle montre que l’exclusion de ces derniers du débat démocratique, loin d’être un problème marginal, risque de mettre en péril l’édifice de cette précieuse liberté, car elle implique une redéfinition de ce que parler veut dire. En d’autres termes, le sort réservé à la pornographie engage moins la protection des mineurs ou des femmes que l’idée même que nos démocraties se font de la parole, et donc de l’étendue comme de la puissance du débat public. Juriste et chercheur au CNRS, Marcela Iacub a notamment publié chez Fayard L’Empire du ventre (2004) et Par le trou de la serrure (2008).