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Depuis des décennies, l’œuvre polyphonique de Julia Kristeva s’est imposée comme une traversée du féminin. Rassemblant conférences inédites, entretiens ou tribunes, ce volume gravite autour d’un foyer central : le féminin à l’âge de la transformation anthropologique. Le féminin que la pensée clinique de Julia Kristeva ausculte et révèle est un féminin transformatif, conditions et source de notre capacité de changer, spécifique à la psycho-sexualité humaine, qui se joue des identités sexuelles autrement que ne le fait la théorie du « genre ». Attentive aux mouvements féministes, mais avec une distance analytique venue de sa pratique du divan et de l’écriture, elle emprunte à de domaines aussi divers et mouvants que la politique et la linguistique, la philosophie et la littérature, l’histoire et l’éthique. Soucieuse de relier le langage au corps vivant, la théoricienne et la romancière questionnent la différence sexuelle et la guerre des sexes, la reliance et l’abjection de l’érotisme maternel, ou le temps du couple « considéré comme un des beaux-arts ». Il fallait illuminer le génie féminin en compagnie de la philosophe Hannah Arendt, la psychanalyste Melanie Klein et l’écrivaine Colette. Il fallait s’éprendre de la jouissance mystique de la carmélite Thérèse d’Avila. Il fallait épouser la révolte du deuxième sexe avec Simone de Beauvoir, en passant par Émilie du Châtelet, Olympe de Gouges et Madame Roland, pour que la traversée s’épure en ce Prélude à une éthique du féminin. Dans cette optique, le « besoin de croire » et « MeToo », les « cas limites » et la sublimation, « l’imaginaire de l’impossible » dans un monde sans Dieu, la chair des mots et des images, la souveraineté du langage chez Saint-Simon ou l’emprise du nihilisme chez Dostoïevski, la décapitation dans la mythologie grecque et le sacrifice sur nos écrans, selon les œuvres des artistes contemporains, s’éclairent de façon nouvelle. Chaque sujet invente son sexe spécifique, qui est tout simplement sa créativité. Essayiste, romancière, psychanalyste, Julia Kristeva, docteur honoris causa de plusieurs universités, dont l’œuvre est traduite dans de nombreux pays – et intégralement aux États-Unis –, a reçu en 2004 le Prix Holberg, équivalent du Nobel pour les sciences humaines.