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Aussi extraordinaire – voire bizarre – que cela puisse paraître, nos mains furent autrefois des nageoires de poissons, notre tête organisée à l'instar de celle d'un poisson (disparu voilà bien longtemps) dépourvu de mâchoire. Quant à notre génome, sorte de collier de perles de tous nos gènes, il est extrêmement proche de celui que possèdent les bactéries apparues il y a trois milliards et demi d'années, nous explique de façon savoureuse le spécialiste d'anatomie de l'université de Chicago. Le 31 mars 2006, après l'avoir cherché pendant des années, Neil Shubin et son équipe ont fini par découvrir dans des zones très hostiles situées au-delà du cercle arctique un animal primitif, vieux de trois cent soixante-quinze millions d'années, sorte de croisement entre un poisson et un alligator. Baptisé Tiktaalik (" grand poisson des basses eaux ", dans la langue inuktitut que parlent les Inuits de cette région), ce fossile très étonnant est une sorte de chaînon manquant entre les poissons et les amphibiens. Non seulement l'animal avait des nageoires mais aussi des poignets et des doigts lui permettant de se soulever. Ce poisson très spécial nous montre donc comment les êtres vivants ont pu finir par sortir des eaux et conquérir la terre ferme. Le grand public se représente souvent les spécialistes d'anatomie et des musées d'histoire naturelle comme de vieux messieurs passant la majeure partie de leur temps devant des étagères poussiéreuses, avec en main des instruments remontant au XIXe siècle. Erreur ! Les paléontologues tel Neil Shubin, qui veulent comprendre comment les êtres vivants ont évolué sur la planète Terre, jusqu'à donner l'être humain – tels que nous sommes aujourd'hui – sont de vrais et téméraires aventuriers. Ils affrontent déserts, montagnes, climats hostiles pour dénicher les précieux fossiles qui leur donneront les informations scientifiques indispensables. Mais ils sont en même temps à la pointe des sciences les plus modernes, comme la génétique et la biologie moléculaire, afin d'analyser le plus précisément possible leurs découvertes uniques.