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Il n’y a plus trace de rien, là-bas. On a déversé des tonnes de sable, vissé des balançoires, planté des arbres et décrété l’insouciance. Mais la mémoire complote. Les chemins serpentent. Le terrain fait des vagues. Le toboggan est habillé d’une tour qui ne guette plus rien. Sous le sable de ce square parisien, il y a la poussière et les secrets d’une prison de femmes. La Petite Roquette, détruite en 1973. Tout le monde a préféré l’oublier. Sauf Angèle. Nul ne lui avait jamais dit qu’elle était née ici, quelque part sous les balançoires, le 16 novembre 1967, un quart d’heure avant l’extinction des feux. Mais sa mère vient de mourir. Helena Danec 1945-2007. Femme sèche et silencieuse. Elle laisse des lettres reçues en prison, un vieil article de presse racontant son procès, et le nom de l’homme qu’elle aimait. Alors le passé ne demande qu’à surgir, qu’à faire entendre les vertiges de l’amour, la beauté d’une époque révoltée et la puissance de la musique. Il réclame des explications, il cherche et emprunte toutes les voix ; celle d’Angèle, celle de Mila sa grand-mère, celle d’un vieux journaliste qui en sait beaucoup plus long que ce qu’il avait écrit, et même celle de l’homme qui s’est enfui. Tous racontent l’histoire d’Helena. Son chagrin. Leurs chagrins