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Qu’est-ce qui différencie une pensée philosophique d’une pensée poétique ? En quoi ces deux sortes d’écriture et de vie se distinguent-elles ? De telles questions ne se poseraient pas si nombre de philosophes ne nous donnaient le sentiment tantôt heureux, tantôt périlleux, de les convoquer ensemble. C’est Nietzsche, dans Ainsi parlait Zarathoustra ; c’est Descartes, rêvant sur ses propres rêves ; Heidegger commentant Hölderlin ou Trakl ; Platon lui-même, recourant au mythe pour expliquer sa République… La déraison poétique des philosophes évoque ces moments où les images, les sons, les rythmes prennent part à la logique de l’argumentation. Ces moments, aussi, où le discours philosophique tente par réduction de venir à bout de l’inquiétante étrangeté du poème. Chacun de ces chapitres est centré sur l’oeuvre d’un philosophe : Platon, Vico, Descartes, Kant, Leopardi… Une place non négligeable est réservée aux philosophies contemporaines : celles de Martin Heidegger, de Jacques Rancière, d’Alain Badiou, de Michel Deguy ou de Jacques Derrida. L’ensemble s’achève par une évocation rêvée (pour cause : elle fut sans témoin) de la fameuse rencontre entre le poète Paul Celan et le philosophe Martin Heidegger dans la hutte de Todtnauberg, en 1967. Il se dit là « des choses terribles » qui, on peut l’imaginer, touchent de près à la relation à l’avenir de notre temps. Il y va du statut de ce qu’on nomme la « raison », sa constitution et ses usages. Sa folie aussi.