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Basé sur des milliers de documents inédits, notamment extraits des dossiers des services secrets britanniques, Présumé Jean Moulin est la biographie la plus complète du héros durant les années 1942 à 1943, et elle révèle quantité de faits inconnus tout en renouvelant radicalement l'interprétation de la relation entre gaullisme et Résistance. Tandis que l'alliance du soldat rouge, du billet vert et de la matière grise britannique endiguent peu à peu le nazisme, pendant que Vichy collabore et que le général de Gaulle s'obstine dans son irréaliste stratégie du tout-militaire-extérieur censée déboucher sur la restauration de l'Etat français, Jean Moulin, jeune préfet de gauche, part, lui, d'un constat pragmatique : la patrie dépecée en sept zones n'est plus une nation auto-instituée et seule la Résistance, aussi minoritaire soit-elle, pourra ressusciter la France en la changeant. Création spontanée de la société civile réduite à la clandestinité, la Résistance est l'embryon de la « Nation en armes », et, à ce titre, l'unique dépositaire de la souveraineté. Par là-même, elle est la seule instance légitime capable de soutenir de Gaulle à condition, toutefois, que celui-ci renonce à la vassaliser et admette que son autorité procèdera d'elle. D'emblée installé en stratège génial d'une Résistance conçue comme force dominante et qui, dès l'été 1942, se révèle être porteuse d'un projet révolutionnaire aussi radicalement socialiste que démocratique, l'habile tacticien qu'est aussi Jean Moulin est sur le point d'avoir fait d'elle l'axe du jeu politique national : l'allié de droite, gaulliste, est utilisé, celui de gauche, communiste, est maîtrisé. L'appareil souterrain dont il l'a dotée, exécutif, « ministères », armée secrète, parlement, devant assurer sa suprématie. Mais, repéré depuis avril 1943, Moulin est arrêté le 21 juin suivant dans des circonstances élucidées ici pour la première fois et dans lesquelles la trahison n'eut aucune place.