Prix public : 17,90 €
Que se passe-t-il dans la sensibilité de deux amants intellectuels ? Lui est écrivain et conférencier : un homme public, habitué à former de jolies phrases auxquelles il croit, et parfois ne croit pas. Elle est professeur de littérature, cernée de mots, de citations, d'auteurs illustres qui forment son univers. Lui est disponible, sans doute par nécessité d'échapper à tant de connaissances livresques. Elle ne voit plus la vie qu'à travers des tragédies écrites, des leçons apprises, des devoirs que rédigent ses étudiants. Entre eux, Shakespeare, Racine, Goethe, Kafka, Pirandello et Gide seront-ils d'insurmontables obstacles ? Mais peut-être, justement, ont-ils besoin de tout cet appareil littéraire pour le balayer et se donner l'un à l'autre. Les élans les plus fous se font ainsi à travers les pages des autres. Elle aime, et ce n'est pas comme dans Georges Sand. Il aime, et ce n'est pas comme dans Tolstoï. Cela empêche-t-il qu'ils parlent de leur métier ? La littérature ne gêne pas l'amour, la passion, l'impatience, l'exaltation. À cause de cette culture, parfois posante, parfois narquoise, le temps leur paraît une notion vaine. Lui est marié. Elle habite les États-Unis. Ils ne se voient pas plus de deux fois par an : à chaque rencontre, c'est l'éblouissement le plus pur. Lorsque, après bien des années, il mourra de maladie, elle ne voudra pas lui survivre, malgré Hemingway, Camus, Claudel, Dante, Stendhal et tous les autres intercesseurs. L'amour de deux intellectuels est plus total que l'amour de deux amants ordinaires. Un aigle peut avoir deux têtes, quand il est impérial. Un amour de tête peut ne pas être de coeur. Mais un amour à deux têtes ? Avec ce roman, son huitième, Alain Bosquet a écrit son oeuvre en prose la plus tendre, la plus émue, la plus élégante. Il semble aussi donner à l'intellectualité une dimension gaie, fraîche et simple dans sa ferveur, qui lui est peut-être utile par ces temps de byzantinisme agressif.