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Dans cette synthèse sans équivalent, Robert Muchembled mène l’enquête et présente les extraordinaires mutations de l’odorat en Occident, de la Renaissance au début du XIXe siècle. Pourquoi l’odorat, ce sens primordial d’adaptation au danger comme de repérage du meilleur partenaire sexuel, demeure-t-il si méconnu ? <br />Son histoire paradoxale, pour peu qu’on s’y attache, est des plus captivantes. <br />Dans cette synthèse sans équivalent, Robert Muchembled mène l’enquête et présente les extraordinaires mutations de l’odorat en Occident, de la Renaissance au début du XIXe siècle.<br />Les sources utilisées sont multiples et riches : manuels de physiognonomie ; oeuvres de médecins, philosophes, poètes, conteurs, théologiens, polémistes, moralistes ; traités de civilité, traités de "Secrets pour dames" ; édits royaux ; règlements du métier de gantier parfumeur, inventaires après-décès (apothicaires, gantiers parfumeurs) ; iconographie du sens olfactif...<br />Muchembled s'empare de cet extraordinaire ensemble et dresse l'histoire du puissant refoulement qui, depuis un demi-millénaire, nous a fait considérer l'odorat comme le plus méprisable des sens avant que de le hisser récemment au rang du plus affûté. <br />Des miasmes exhalés par les concentrations humaines aux émanations intimes nauséabondes, des senteurs "excrémentielles" (musc, civette et ambre) prétendument protectrices de la peste aux condamnations des moralistes, de la révolution olfactive du XVIIIe siècle, qui transforme la goutte de parfum floral ou fruité en vecteur d'hédonisme jusqu'aux dernières découvertes scientifiques, c'est à un extraordinaire voyage olfactif dans la civilisation des mœurs que Muchembled convie son lecteur. The growing demonisation, from the Renaissance to the Enlightenment, of the least understood of our senses—that of smell—elucidates the manner in which the Western “Civilisation of Manners” has revolutionised our perception of the human body, culminating today in a powerful self-discipline primarily characterised by our societies’ deodorisation. From the Renaissance on, sight and hearing have been viewed more and more as the noble senses, reminiscent of the divine, unlike the proximal senses, too closely associated with animality and sexuality. <br /><br />The sense of smell was the one most targeted by the Moralists, for they believed that the devil hid behind waste, plague vapours, human excrement and the lower body, particularly that of the female. Therefore the self-monitoring of such layers of hell, especially by the nose (whose form and length were thought to equate with those of the male and female sex organs), was the subject of every scholarly discourse, while stenches prevailed in this world, especially in large cities such as Paris or Naples. A multiform shaming mechanism urged us to reject and to sublimate this strongly animalistic side of humans. <br /><br />However, eliminating bad odours was not yet on the agenda. In fact, we were treating one evil with another, chasing away the plague by using the even more terrible odour of a goat, and by protecting body orifices and skin pores with highly fragrant substances. Perfumes, often of animal origin (musk), were used to chase away demons, but were also viewed as satanic traps. Such ambivalence persisted until the mid-18th century, when perfumes—increasingly floral—gained popularity in a more hedonic world. They then became part of a sublimation process by producing an olfactive barrier to counteract external stenches and body odours. <br /><br /><br /><em><strong>Robert Muchembled</strong>, Professor Emeritus at Université de Paris 13 (Paris Sorbonne Cité) and Chevalier de la Légion d’honneur, has written over 30 books translated into several dozen languages, notably </em>La Société policée. Politique et politesse en France du XVIe au XXe siècle <em>(Seuil, 1998); </em>Une histoire du diable, XIIe-XXe siècle <em>(Seuil, 2000); and </em>Passions de femmes au temps de la reine Margot (1553-1615)<em> (Seuil, 2003), etc.</em> Dans cette étude passionnante, aux prolongements insoupçonnés, Roger Muchembled explore ce corpus impalpable, et sa lecture donne le sentiment d'aborder un continent aussi riche que mystérieux. [...] Un voyage putride - dont un lecteur issu de notre société aseptisée ne sort pas indemne - qui se poursuit par un décryptage éclairant du rapport au corps à travers les siècles. Robert Muchembled illustre, par des textes passionnants, la moralisation de l'apprentissage olfactif [qui] a conduit à dissimuler les mauvaises odeurs sous des couches de parfums de plus en plus fruités, signe d'une féminisation de la société et d'un progrès de la civilisation.<br /> La grande transformation décrite dans l'ouvrage mettra donc un siècle pour triompher : à partir des années 1750, c'est l'obsession de la propreté, de la beauté et de l'odeur délicate, voire presque naturelle, qui domine. Ateliers, échoppes, cours princières, chambres ou rues : c'est dans tous ces lieux que Robert Muchembled, grand arpenteur de « l'histoire des mentalités », est allé débusquer les odeurs. II s'attaque dans son dernier livre à cet odorat qui en dit long sur le fonctionnement des sociétés. C’est aux odeurs et à la place qu’on leur accorde du XVIe au début du XIXe siècle que Muchembled consacre un essai finement nuancé, dont il ressort moins l’idée d’un progrès continu que celle de changements de style à travers le temps. Les parfums, un objet historique comme un autre? Robert Muchembled l'affirme dans l'introduction de son dernier livre, soulignant que le sens olfactif résulte de l'apprentissage et a donc une dimension éminemment sociale : il produit du lien ou du rejet.