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Catherine Carlo: Les étudiants « Erasmus » saisis par l'Europe ? Résumé : Il y a une dizaine d'années, une enquête par entretiens avait été menée à l'Université Paris 8 (Carlo et Poisson-Quinton, 2001), auprès de 20 étudiants participant à un échange « Erasmus », notamment pour cerner les représentations qu'avaient de l'Europe ces étudiants. Les résultats avaient fait apparaître des caractéristiques saillantes. Le programme ERASMUS a maintenant 24 ans, l'Europe s'est considérablement étendue, le CECRL, élaboré sur la base d'une culture d'apprentissage des langues postulée partagée, est aujourd'hui largement connu et invoqué dans la plupart des pays d'Europe, la réflexion sur l'apprentissage plurilingue d'une part et celle portant sur la construction identitaire intégrative d'autre part se développent au-delà des cercles restreints dans lesquels elles sont nées. La question se pose donc de savoir comment se dessine aujourd'hui l'Europe dans les représentations des étudiants, si l'on considère que les représentations valent d'être éclairées parce qu'elles permettent l'intercompréhension, et orientent les comportements (Py, 2000 : 14). Les résultats de la première enquête seront mis en regard avec les résultats de l'enquête menée durant le premier semestre universitaire 2010-2011, selon le même protocole. Cette seconde enquête s'attachera en outre à la question de la perception d'une culture éducative européenne – question qui n'était pas, comme elle l'est devenue, au cœur des préoccupations universitaires – et à celle des contours de l'Europe. Maddalena DE CARLO et Laura DIAMANTI: Les vécus des étudiants Erasmus pendant leur séjour à l'étranger : un apprentissage expérientiel Résumé : Au cours des dernières années, de nombreuses recherches se sont penchées sur les finalités explicites du projet Erasmus, sur les résultats véritablement atteints et sur les risques de réduction de cette expérience de mobilité dans l'espace européen à un simple stage linguistique. Si d'une part le séjour à l'étranger peut apparaître comme un puissant moyen de décentration culturelle, d'autre part le considérer comme un processus naturel, activé automatiquement par la fréquentation de l'autre, serait nier les implications affectives liées aux sens de dépaysement et d'isolement vécus par l'étudiant voyageur dans le pays étranger et à son retour chez lui. À ce propos des travaux récents ont suggéré des « dispositifs d'accompagnement » à la mobilité (Anquetil 2006) de façon à développer, parallèlement aux savoirs disciplinaires et aux postures intellectuelles, des capacités d'adaptation aux divers contextes culturels. Cette étude se situe dans cet axe de recherche : les réponses d'étudiants interrogés relativement à leur expérience de mobilité, nous ont permis de dégager des pistes sur les vécus interculturels et les besoins sociaux expérimentés lors d'un séjour Erasmus Camille GUYON-LECOQ: Retour analytique sur une expérience pédagogique ou plaidoyer pour des cours d'histoire de la culture et des idées françaises à destination des étudiants Erasmus Résumé : Convaincue par une enquête menée auprès de nos étudiants Erasmus que l'obstacle majeur à une authentique appropriation culturelle est la discordance entre l'image qu'ils se font de la culture française et l'expérience qu'ils font de cette culture lors de leur séjour, nous avons mené, dans cette circonstance d'enseignement exceptionnelle que fut, en 2009, un blocage universitaire partiel, une expérience pédagogique qui nous a donné l'occasion de préciser l'idée que, pour aider efficacement les étudiants Erasmus à prendre conscience des efforts qu'ils doivent faire pour combler leurs lacunes en matière culturelle, un enseignement d'Histoire de la culture et des idées françaises ne devait pas seulement proposer une approche critique des stéréotypes ou substituer des savoirs à des pseudo-savoirs, mais aussi, et presque contradictoirement, se donner pour but d'enseigner de manière systématique tout à la fois les « lieux communs » et une méthode de lecture spécifique qui les aide à s'orienter dans cette prose d'idées contemporaine saturée de culture incorporée, de lieux (culturels) communs, qu'est la grande presse. L'article propose des réflexions sur des pratiques mais aussi des exemples de méthode, l'un sur le sujet de la grève des enseignants-chercheurs, d'une fable de La Fontaine à un article de Philippe d'Iribarne, l'autre sur l'idée de « Modernité », d'une page de Fontenelle à deux articles de Claude Imbert et Jacques Julliard. Jean-Michel Robert: Lexiculture et noms propres terrain miné pour étudiants Erasmus Résumé : La lexiculture, conçue pour intégrer plus intimement l'enseignement de la culture à l'enseignement de la langue, s'avère d'un abord difficile quand certains termes sont dotés d'un poids connotatif qui échappe aux étudiants étrangers comme par exemple le public ERASMUS. Que ce soit du fait de la valeur ajoutée au signifié de certains mots, la charge culturelle partagée (culture courante) inconnue des apprenants ou par manque de connaissances dans le domaine de la culture savante, le maniement des noms propres et leurs dérivés (l'adjectif éponyme), tant en culture savante qu'en culture courante, révèle, chez ces étudiants étrangers, des lacunes culturelles. L'enseignement/apprentissage de ces faits de langue concerne aussi bien le français langue étrangère ou seconde que le français académique, universitaire. Philippe NORMAND: Balaise dans la civilisation ou balaise dans la culture ? Résumé : En passant de l'interculturel à l'interculturalité, les recherches ethno-anthropologiques postmodernes voudraient se débarrasser de la réflexion sur la culture entendue comme contenu des cours dits de civilisation. En effet, seule l'étude des processus d'interculturation permettraient une meilleure compréhension des « diverses diversités » de nos sociétés contemporaines. Cependant l'éducation des étudiants Erasmus et le CECRL, s'inscrivent dans une tradition éducative à visée humaniste traversée de débats idéologiques sur le SAVOIR et le SAVOIR-FAIRE. Maddalena DE CARLO: Réflexions sur une compétence difficile à cerner : le savoir-être. Tentative de déclinaison à la lumière du concept de reconnaissance Résumé : Cette contribution complète l'étude présentée dans ce même numéro (cf. De Carlo et Diamanti), concernant le vécu interculturel et les besoins linguistico-culturels d'étudiants ERASMUS. L'auteure propose en particulier des réflexions concernant une des compétences générales présentes dans le Cadre Européen de Référence pour les Langues : le savoir-être, interprétée dans ce contexte particulier comme la capacité « de resituer et redéfinir ses propres points de repère au cours de l'expérience de l'altérité ». Plusieurs auteurs ont souligné la difficulté à cerner cette compétence relevant de la sphère intime de l'individu : comment relever ce défi éthique qu'est la formation de l'individu, sans que cela se traduise par des préceptes moralisateurs ? D'autre part, si tout apprentissage linguistique met les individus face à la diversité et à l'altérité, l'expérience de mobilité constitue sans doute le moment privilégié où les représentations et convictions de chacun sont mises « à l'épreuve de l'étranger ». Le concept de reconnaissance, élaboré par le philosophe Paul Ricœur, peut constituer une précieuse réflexion sur la compétence de savoir-être, car il représente d'une part la possibilité de construire l'existence de soi par l'autre ; d'autre part il dépasse la sphère individuelle pour investir la sphère publique, vu qu'en éducation on a toujours affaire à des individus, mais aussi à des communautés, à des cultures et aux institutions qui les expriment.