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« Je suis née au creux des montagnes, là où le ciel change de couleur dans la courbure du vent. Derrière le vent, en contrebas de la colline, se dressait le minaret du village. À heures régulières, la voix du muezzin annonçait le nom des dernières victimes tombées sous les bombes. Étrangers à eux-mêmes, au milieu d’un champ de ruines, les cœurs trop lourds s’efforçaient de se décharger de l’horreur. Hier, des enfants étaient nés sans mère, d’autres tiraient désespérément sur le cordon, à contretemps des projectiles. Voilà qui aurait dû suffire à nous rendre fous ! » De son enfance, Nine ne sait rien d’autre : rien que la rencontre de ses parents en Algérie, leur amour trop bref, et son père fauché par la guerre dont on a déposé le cœur « dans une cabane en bois ». Madame Plume, sa mère, ne parle pas de ce passé, de son pays, de ses souvenirs. Un jour, elle s’est arrachée à la sollicitude de Fatma la douce, elle a fui son village de Kabylie pour emmener sa petite dans une ville du nord de la France, où elles ont vécu toutes les deux en étroit duo. Alors « une autre errance commence, célébrant le désert sous un ciel trop bas ». Nine grandit tout contre sa mère, avec une soif de savoir, de comprendre et de se libérer qui passera par l’apprentissage du piano, du langage, et aussi par un retour en Kabylie, sur la terre des origines. Ce court récit de l’exil épouse le rythme et la poésie du conte pour nous évoquer la quête identitaire d’une enfant éblouie par son histoire silencieuse. ils en parlent… « Si l’on mettait des habits formalistes, on dirait : c’est une sculpture. Chaque phrase cherche la matière de ce qu’elle décrit, la pétrit, attentive aux éléments, aux sens [...] » Éric Loret. Libération.