Prix public : 22,80 €
Entrée au catalogue d’un géant de la littérature australienne, double vainqueur du Booker Prize (Oscar et Lucinda, 1988 et Véritable histoire du gang Kelly, 2001). Le nouveau roman de Peter Carey fait dialoguer deux voix et deux destins. Séparés par plus d’un siècle, deux êtres fous d’amour et de chagrin poursuivent le même but : alors qu’en 1854, Henry Brandling cherche un horloger capable de construire un jouet mécanique qui guérira son fils, en 2010 Catherine Gehrig affronte la mort de son amant secret en restaurant le même automate. Reliés par des carnets (que l’un écrit et que l’autre lit) et par leurs interrogations sur la mort, l’amour et la technique, ces deux personnages émouvants découvrent progressivement que ce jouet mécanique recèle des mystères bien plus grands. La Chimie des larmes est un grand roman sur la force créatrice et sa participation à notre capacité de résilience. Le matin du 21 avril 2010, en arrivant au Musée Swinburne à Londres, où elle travaille comme conservatrice spécialisée en horlogerie, Catherine Gehrig apprend la mort de Matthew Tindall, son collègue et amant depuis treize ans. Avec cet homme, marié et père de famille, Catherine s’était construit un univers d’amour rédempteur et fantasque. En une seconde, tout s’effondre. Matthew lui est arraché deux fois : par la mort, et par le secret de leur relation, qui lui interdit de se rendre aux funérailles et de faire véritablement son deuil. Alors qu’elle sombre dans la dépression, Éric Croft, le conservateur en chef du musée, lui confie un projet de restauration. Il est l’une des rares personnes à connaître le secret de Catherine, et s’attache à lui redonner goût à la vie. Il l’installe dans un atelier discret de l’annexe du musée, lui propose une brillante assistante et supporte avec patience ses crises de larmes et ses accès de colère. Lorsque Catherine ouvre les huit caisses que Croft a fait apporter dans son atelier, elle découvre les pièces détachées d’un jouet mécanique du XIXe siècle ainsi qu’une dizaine de carnets, une sorte de journal intime. En même temps que le lecteur, elle entame la lecture de ces pages écrites en 1854 par Henry Brandling, un aristocrate anglais dont le fils, Percy, est atteint de tuberculose. Afin de redonner le goût de vivre à son fils chéri atteint de tuberculose, Brandling lui promet de lui faire construire le canard de Vaucanson, un automate d’oiseau capable de marcher, de s’asseoir, de manger et de déféquer. Pour cela, il quitte sa propriété anglaise pour les mystérieux villages de la Forêt-Noire, en Allemagne. Là, pense-t-il, se trouve une “puissante race d’horlogers”, seule capable de construire cet automate extraordinaire. Parmi une galerie de personnages dignes des inquiétants contes des frères Grimm, Henry fait la rencontre de Sumper, un homme étrange et talentueux qui transforme le projet du canard en un automate encore plus fascinant et sophistiqué. Intriguée, captivée, Catherine s’attelle à la restauration du jouet mécanique. À travers l’alternance et, parfois, le dialogue entre les voix d’Henry et de Catherine, des liens complexes se tissent entre les lieux et les époques. Les débuts de la révolution industrielle, période où la technique est la promesse d’un avenir glorieux, sont vus à travers le prisme de notre époque où elle est aussi le symbole de toutes sortes de menaces. Alors que le golfe du Mexique est pollué par la marée noire et que le musée est confronté à de graves difficultés de financement, la restauration du jouet devient un enjeu critique sur bien des plans. Grâce à l’action et la création, grâce à la rencontre avec d’autres personnes bienveillantes, grâce à une aventure qui les dépasse et leur ouvre une porte inespérée, les deux héros de ce prodigieux roman retrouvent en eux les ressources pour continuer à vivre. Par une mise en abîme raffinée, légère, magnifique, l’auteur ne nous parle pas seulement d’un fantastique animal automate, de sa création et de sa reconstruction, mais aussi des caractéristiques d’une œuvre romanesque capable d’imiter la vie à partir de pièces détachées, de bribes d’histoires, de sentiments forts. Peter Carey montre comment la force créatrice peut faire naître en nous la capacité de résilience qui nous permet d’affronter toutes les épreuves et de ne pas perdre notre énergie vitale après un traumatisme. Ce roman fonctionne comme une merveilleuse mécanique dont on oublie l’artifice tant il est abouti.