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Employés par des sous-traitants aux quatre coins du monde, les modératrices et modérateurs de contenu sont les travailleurs de l’ombre chargés de purger les sites Internet, les réseaux sociaux et les applications mobiles des photos, vidéos ou commentaires abjects qui les inondent : propos haineux, cyber-harcèlement, injures racistes ou sexistes, automutilations et tortures, viols et décapitations, pédophilie…À travers des dizaines d’entretiens menés avec ces collecteurs de déchets numériques dans les zones rurales de l’Iowa, dans la Silicon Valley, au Canada et aux Philippines, cette enquête met au jour l’économie souterraine d’une industrie dont les coulisses tranchent avec le progressisme revendiqué. À rebours de l’optimisme libertaire des pionniers du Web, le filtrage des torrents de violence, de pornographie et de fiel déversés sur nos écrans s’impose aujourd’hui comme une tâche à la fois indispensable et sisyphéenne. Ses enjeux en termes de réglementation de la liberté d’expression et de délimitation des frontières du dicible et du montrable à l’échelle planétaire restent néanmoins largement ignorés.Alors que les controverses autour des fake news, des discours de haine et du harcèlement en ligne obligent peu à peu les plateformes à rompre l’illusion d’une modération « automatique », Sarah Roberts révèle les conditions de travail des substituts de l’« intelligence artificielle » et les risques psychologiques auxquels sont exposés celles et ceux dont le quotidien connecté consiste à visionner à la chaîne des contenus insoutenables pour que nous n’y soyons pas confrontés.