Prix public : 12,00 €
La collection Miniatures s’était aventurée une fois, une seule, dans l’une des treize régions de France (à l’époque vingt-deux) avec le volume consacré à la Corse. C’était en 2008. Avec ce volume consacré à la Bretagne et à ses auteurs, nous renouvelons donc l’expérience éditoriale. À savoir l’approche par la littérature, non pas dans ce cas d’un pays ou d’une langue, mais d’une région française qui, d’une certaine façon, de par sa langue et son histoire populaire notamment, a toutes les caractéritiques d’un pays. Et quelle langue, le breton étant la troisième langue celtique parlée au monde, après le gallois et l’irlandais ! Ce « Miniatures Bretagne », ou Breizh, (composé de nouvelles écrites en français), aurait aussi pu être un « Miniatures celtique », car évoquer le contexte géographique et historique de la Bretagne y mène. La frange celtique, c’est cet ensemble de régions et de pays de l’ouest européen : Irlande, pays de Galles, Cornouaille, île de Man et Bretagne, mais aussi Galice et Asturies (bien que les langues locales y soient d’origine latine). La culture celtique, c’est cette civilisation spécifique, immédiatement identifiable, avec les vestiges qu’elle a laissés, et les croyances et les mythes que les spécialistes des mythologies comparées ont pu reconstituer. Tous ces pays et régions ont en partage de se situer à l’extrême ouest de l’Europe, de faire face au vaste océan Atlantique et de s’être projetés des siècles durant de l’autre côté de cette immense masse d’eau : aux Amériques. Car comme chacun sait, tout Breton est un marin dans l’âme. Il faut être bien installé sur la terrasse de plein air du Chenal1, à Porspoder, dans le Finistère nord, en bordure d’océan, fouettée par les vents puissants du large, pour (éventuellement) comprendre un peu mieux la Bretagne. Ici, dans cette région superbe des abers comme dans de nombreux autres endroits de Bretagne, l’homme est en prise directe avec les éléments. Il y a la littérature française, il y a la littérature francophone, mais il y a aussi ce que l’on connaît moins : les littératures de langue française marquées par un cadre dit régional. Le « régionalisme » n’a pas toujours bonne presse dans le monde éditorial français, très parisianiste : la centralisation politique et administrative (ce vieux jacobinisme au passé glorieux, mais aujourd’hui fatigant et fatigué dans une Europe protéiforme), et, par voie de conséquence, la centralisation culturelle à la française, l’élitisme parisien, tendent toujours à écraser les particularismes des régions. De leurs extraordinaires langues enracinées dans l’Histoire et de tout ce qui en fait des régions aux caractéristiques propres, seules les moins soumises sont en mesure de faire entendre leur différence. pourtant, deux écrivains français sur trois sont issus des régions, mais la centrifugeuse parisienne les fait souvent renoncer, dans leurs écrits, à leurs racines. Tout cela en visant à l’universel. Paradoxalement, il serait très chic d’être un écrivain haïtien et très ringard d’être un écrivain auvergnat. De Cancale à Pornic, ce n’est pas tout à fait la même histoire, mais un fonds commun d’histoires, sûrement. Les six nouvelles d’écrivains bretons de ce volume, savamment réunies par l’un d’eux, Hervé Bellec, posent bien le décor, les atmosphères, les personnages, les destinées. Tout y est pour un beau et riche voyage en terre bretonne. Pierre Astier