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À l’instar de l’être, l’existence semble le concept le plus englobant et le moins spécifiant de tous : j’existe, les autres existent, les choses qui m’environnent existent, certains diront même que Dieu existe. Or, lorsque l’extension est maximale, la compréhension est minimale : l’existence semble ne pas pouvoir être définie, elle ne peut qu’être constatée. Après des siècles de métaphysique, c’est la conclusion à laquelle arrive Kant dans la Dialectique transcendantale : l’existence n’est pas un prédicat réel. C’est le même concept que j’ai d’une table possible et d’une table réelle : le concept est indifférent à l’existence. Et pour cause : si l’existence s’ajoutait au concept de la chose, alors la chose changerait de nature ou de définition en se mettant à exister. Par conséquent, comme dit Kant, « le réel ne contient rien de plus que le simple possible » . Du point de vue du concept, le réel existant égale le possible ; l’existence, que ce soit celle de la table, de l’homme ou de Dieu, ne peut constituer une propriété supplémentaire qui s’ajouterait à toutes celles que contient l’essence de l’étant considéré. Il faut donc sortir du concept pour affirmer une existence ; et c’est parce que l’existence est transcendante au concept qu’on ne peut démontrer l’existence de Dieu – c’est la preuve ontologique que vise ici Kant, et c’est toute la théologie rationnelle qui s’effondre par là : nulle essence ne contient en elle son existence à titre de propriété. Mais si le logos peut tout dire, cette étrangeté de l’existence à l’ordre conceptuel doit pouvoir être conjurée. Kant nous lègue ainsi un double défi : celui de donner un concept de l’existence, et celui de décorréler existence et transcendance.