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Paul Valéry parlait de deux visions possibles du monde: la vision qui morcelle, la vision qui unit. Mon œil n'a pu choisir. Vouloir comprendre l'Inde, n'est-ce pas vouloir appréhender la démesure d'un pays qui dans vingt ans sera le plus peuplé du monde? Ne pas chercher à comprendre, encore moins à juger même si nous pensons nos valeurs comme universelles. Probablement pouvons-nous simplement accepter une juxtaposition d'images, un kaléidoscope de sentiments exacerbés mais refusant de nous livrer une compréhension cohérente conforme à notre culture. En fait chacun à son image de l'Inde, image réduite par ses propres peurs. Nos modes de vie étant impossibles à fusionner voire simplement à comparer, un pont est-il possible? Faire le vide dans nos têtes sous peine de rejet, oublier tous nos référents, le voulons-nous? Un livre de photographies sur l'Inde ne peut donc être que partiel et partial et celui-ci le revendique. Surtout si les photographes sont, parait-il, des voyeurs ou pire des voleurs. Toujours avoir à se disculper. Le voyeur n'est-il pas celui qui voit sans être vu? Ma bonne conscience fait me réfugier derrière la proximité. Quasi toutes mes photos sont faites avec, parmi, au milieu de celles et ceux que j'ai rencontrés. Voleur? Un espoir de rédemption en pensant que ces photos sont le résultat d'échanges même rapides ou fugaces, d'un regard et parfois j'aime à le croire, d'une connivence. Aller vers l'autre, y plonger son regard. Mais c'est vrai certaines sont volées. Je n'ai pu me résoudre à m'en séparer, elles montrent cette Inde multiple comme ces cinq jeunes en moto sur une route du Rajasthan, une seule moto rétroviseurs repliés, affirmant une foi sans faille en leur destin...