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Une violente douleur dans les côtes me réveille. La tête encore dans le pâté de la veille, j’ouvre les yeux, je me redresse péniblement sur un coude, le souffle coupé. Bob et Igor se tiennent debout devant moi. A contre-jour, leurs immenses silhouettes se découpent dans l’éclat du soleil matinal. Bob démarre la tronçonneuse. Il me regarde avec des yeux de dingue. Je commence à comprendre que quelque chose ne tourne pas rond. La suite confirme mes doutes. Il me pose la lame de la Stihl sur le ventre. Igor s’accroupit et se penche vers moi. Il me dit d’une voix calme :
« On vient de se rendre compte d’un truc bizarre ce matin. Qu’est-ce que tu fous avec la 504 de Tapotour ? Ça nous intrigue, tu comprends. ». Je les regarde en affichant un air con, genre le mec qui n’a pas compris la question. Ça, je sais bien le faire et ça me permet de gagner du temps. Je prends une baffe magistrale qui m’éclate la lèvre. Je ne l’ai pas vue venir. Igor intervient :
« Doucement Bob, vas-y mollo. »
D’un revers de manche ensablé, j’essuie le filet de sang. Igor reprend : « Tu vas nous expliquer un truc Raoul. On paume Tapotour à Barcelone et toi, tu débarques au milieu du désert avec sa voiture. Tu avoueras que c’est pour le moins étrange, non ? » Bob appuie la tronçonneuse sur mon bide. Il l’enfonce un peu plus en grommelant :
« Il est où Tapotour ? »
Le moteur tourne au ralenti, mais s’il appuie sur la gâchette, il me coupe en deux. « Le Libéria, on sait pas où ça se trouve connard ! »
Il relâche un peu la pression. Je profite du répit pour chercher un peu d’oxygène. Je rencontre la chaussure de Bob en plein shoot. Ma tête résonne comme une cymbale crash. A bout de souffle, je retombe sur le flanc.
Je me recroqueville pour parer les coups durs qui ne vont pas manquer de pleuvoir. En même temps, je cherche une explication qui tienne la route. Pas évident. J’ai la pommette gauche en feu. A travers mes lèvres boursouflées, j’articule :
« Tapotour est un enfoiré. Je lui ai piqué sa voiture parce qu’il m’a fait un coup de pute.
- Où et quand ?
- En Algérie. Au kilomètre 205. »
Igor se redresse d’un coup en frappant dans les mains.
« Bien. On va le chercher. Allez, en route ! » Bob arrête la tronçonneuse et la range dans le 4X4. Je subodore une infime chance de salut à saisir. D’un bond, je me lève et je pique un sprint jusqu’à la 504 garée un peu plus loin. Bob et Igor me regardent courir sans réagir. Je saute dans l’auto. Plus de clé de contact. Ils s’approchent d’un pas tranquille. Igor fait tinter les clés au bout de ses doigts. Vite, je plonge la main dans la garniture de portière, extirpe le P38 Spécial de son étui et pointe le canon de…