Prix public : 25,00 €
Livre aux deux portes d’entrée ou sortie. Sur des habits d’ombre et de lumière. Juste de quoi ganter les mains de l’artiste Yves Privé car le ciel a battu ces portes. L’artiste est peintre et photographe pour ce recueil car c’est souvent la matière qui l’emporte et oeuvre notamment dans le bois tranché ou taillé. Ces arbres complémentaires jouent à la marelle du coeur, à dessiner les routes qui mènent à soi-même, qui permettent à ces oeuvres comme jamais de s’étonner d’être sous l’oeil des mots, d’avoir été le ciment de ce recueil. L’écrivain raconte la douleur (« complémentaire ») d’être au monde, le déracinement qui fait trembler son âme difficile, et la vive présence d’un « point d’ancrage » qui se refuse à son désir. Les mots lui sont des larmes ou des alarmes qui annoncent un incendie improbable ou l’orage des défaites. Peut-être les pluies bienfaisantes. Les photographies de l’artiste lui sont miroir dans un jour qui se noie dans la nuit. L’écrivain Stéphane Beau a la maîtrise des aphorismes. Il sait avec le couteau de l’esprit dessiner ses colères, son amertume légendaire de Pierrot lunaire, mais aussi donner la vie au langage toujours avec cette pointe d’humour. La poésie même du langage est à fleur de peau de ses mots. Ces textes ont toujours l’élégance d’un vrai ressenti. Serait-il enfin aux portes d’un poème qui frappe à la porte de son coeur jusqu’à devenir poète d’une joie insoupçonnée ? Les photographies d’Yves Privé arborisent les phrases claires de Stéphane. C’est une douce alliance qui a permis cette rencontre. Plus de questions à résoudre. Sinon s’accrocher aux branches du vent et faire en sorte qu’il gonfle, qu’il gonfle… les voiles du rêve et de la vie. Les peintures franches d’Yves ouvrent une histoire d’amour de deuil aux oiseaux de passage de notre coeur. La poète fauche les blés de son ancien amour avec délicatesse. Comme une réponse lointaine au poème de René Guy Cadou : « Rien ne subsistera du voyageur, le vent de la déroute aura tout emporté ». Les poèmes de Bénédicte Guillou ont le privilège de dire la fin d’aimer en douceur. Le songe se fige devant tant d’impertinence. L’amant s’évanouit à la fin des crépuscules. Le poème clame le secours comme un silence qui aurait retrouvé la parole. La marée de la nuit est pourtant dans les bras du chant d’amour. Les corps se sont tus mais les mots ont levé l’ancre des futures joies. « Et ma jupe / Tulipe à l’envers » chantera malgré tout, les possibles des retours. La poète a laissé courir son chant sur la peinture de l’artiste. La peau et l’écorce de l’art du peintre-photographe se fortifient ainsi car son oeil sculpte le mouvement des choses et l’apprivoise.Avant-Lire de Luc Vidal