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Alors que les séries anglo-saxonnes font des gorges chaudes sur les innovations policières américaines, d’aucuns se plaisent à rappeler l’antériorité de la police scientifique française. Et ils n’ont pas tout à fait tort. Dans un XIXe siècle marqué par le sceau du scientisme, dans un XIXe siècle baignant dans le paradigme de l’indice, y compris dans le domaine de l’art, dans un XIXe siècle voyant l’institutionnalisation de la dactyloscopie ou science des empreintes digitales, c’est bel et bien le nom du Français Alphonse Bertillon qui s’impose. Avec son élève Edmond Locard, il va devenir le socle d’une police scientifique française amenée à s’épanouir pleinement dans l’entre-deux-guerres. Ce succès se mesure notamment au grand nombre de vocations suscitées, ce qui atteste l’existence d’une véritable culture forensique. Source d’inspiration ou de discussion au-delà des frontières, la police scientifique française entre néanmoins en concurrence avec d’autres pôles. Elle doit aussi affronter ses propres divisions internes, la criminalistique restant une fonction partagée par de nombreux acteurs du maintien de l’ordre. Lorsque la prise de conscience d’un déclin s’opère à la fin des années 1940, nier les signes avant-coureurs relèverait donc de la naïveté. La traversée du désert ne prend fin qu’à la fin des années 1980 à la faveur d’une grande remise à plat conduite par Jacques Gential. Refondée sur les principes mêmes de ses pionniers, la police scientifique française renoue ainsi avec son leadership d’antan.
Amos FRAPPA est le lauréat du prix de thèse 2021 de l’institut des hautes études du ministère de l’Intérieur (IHEMI)