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Selon Martin Heidegger, la tradition dominante de la philosophie occidentale s'est structurée autour d'approches et de partis pris qui ont conditionné le devenir ultérieur de la philosophie, notamment après Platon et Aristote. Lors de ce premier commencement, l'approche ouverte des penseurs présocratiques et les problèmes fondamentaux identifiés n'auraient pas été explorés jusqu'à mettre en relation une philosophie vivante de notre relation au monde avec une philosophie de la connaissance logiquement consistante. Au contraire, plusieurs siècles après, bâti sur un « oubli de l'Être », les courants de pensée comme le rationalisme, le libéralisme, le matérialisme aboutissent à une vision abstraite et problématique d'un « progrès » qui autoriserait une transformation sans limite de l'individu et du monde qui l'entoure. C'est pourquoi Heidegger interprète l'absence de mesure - l'hubris - et la crise des valeurs typiques du nihilisme occidental comme le signe d'une « fin de la philosophie ». Au travers de ses enseignements, conférences et écrits, la pensée de Heidegger conceptualise cette crise et initie une démarche concrète pour un « autre commencement » : seule une profonde refondation philosophique pourrait conduire l'humanité à rompre avec les dimensions aveugles du projet matérialiste et technicien porté à son époque par l'Occident libéral et bourgeois. Mais Alexandre Douguine avertit qu'on ne pourrait comprendre le discours et les écrits de Heidegger en négligeant le contexte idéologique et politique de celui-ci. Or, l'intégralité des écrits de Heidegger - mort en 1976 - n'a commencé à être publié qu'en 1989, car celui-ci estimait que la publication de certaines oeuvres fondamentales posait problème dans le contexte de l'après-guerre : la période était chargée d'hostilité face aux discours issu de la Révolution conservatrice face au modernisme débridé. En convoquant les « traités non publiés », écrits de 1935 à 1942, Alexandre Douguine éclaire les zones d'ombre et les silences d'un maître à penser qui naviguait entre « révolution conservatrice » et « révolution philosophique » tout en se démarquant subtilement de l'hitlérisme. Cette recherche inédite sur les aspirations intrinsèques et les contours d'un projet social et politique en rupture permettent d'éclairer les thèmes et les enjeux philosophiques de la « philosophie pour un autre commencement » de Heidegger. Dans la perspective d'une refondation existentielle, sociale et politique, cette présentation ambitieuse et didactique d'Alexandre Douguine éclaire l'unité et le sens profond de l'oeuvre de l'un des philosophes les plus importants et influents du XXe siècle.