Prix public : 25,00 €
Un bébé sur un quai de gare que serre sa maman sur son coeur, un père qui repart à la guerre en 1916, après une courte permission donnée pour la naissance de son enfant, puis une explosion, le désastre, la mort.
Cet homme nié est le grand-père de Colette Pourroy, dont le fils sidéré, privé de mots, devint mutique.
Rien n’aura été transmis que le silence, qui réunit dans la séparation, et la douleur qui mènera à soixante-treize ans une veuve vers le suicide par noyade, la bouche remplie de l’eau létale de l’histoire du crime de son siècle.
L’appareil photographique de la petite-fille ne cessant, livre après livre, d’interroger sa généalogie familiale, est une fabrique de fantômes, une chambre d’écho pour une parole absente.
Un cahier est ouvert sur un fauteuil au tissu élimé, l’écriture est encore lisible, mais les noms sont recouverts de suie.
Dans son dialogue intérieur avec l’indicible, Colette Pourroy interroge le néant.
Le grand-père, qui était ingénieur et sculpteur avant d’être un soldat vaincu de vingt-neuf ans, avait sculpté deux mois avant sa mort un coupe-papier en forme d’obus surmonté d’un trèfle à quatre feuilles taillé dans du laiton doré.
Fidèle à son aïeul, Colette Pourroy, rejouant dans le tarot de ses vingt-deux images les signes du destin, invite un rite d’exorcisme pour transformer le mal en illuminations discrètes.
Des draps froissés rassemblés en vortex de rose monte l’espoir d’un hosannah.
Fabien Ribery (extrait)