Prix public : 42,00 €
Lorsque dans les dernières années nous parlions du Père Fessard, les yeux usés de Gabriel Marcel s’embuaient, il murmurait comme pour lui-même : « Ah ! le Père Fessard ! il y a entre nous deux quelque chose d’inoubliable… ». D’inoubliable et d’inexprimable. Je faisais par t de cette émotion au Père Fessard , il hochait la tête, ému lui-même : « Oui le souvenir de sa femme, la mort de Jacqueline… ». Elle était entre eux un lien toujours vivant, alors même qu’ils se rencontraient moins depuis que le Père Fessard était exilé à Chantilly et que l’âge les rendait moins mobiles. Les lettres publiées dans ce volume, soigneusement annotées par les soins de leur ami commun le Père Henri de Lubac, de Marie Rougier et du Père Michel Sales, avec l’aide d’Anne Marcel qui en assuré le déchiffrement, témoignent de cette amitié exceptionnelle de quarante ans. Elles font pressentir l’inoubliable qui les unissait. Leur caractère unique d’intimité et de confidence n’a pas facilité la décision de les publier, mais leur qualité spirituelle et ce qu’elles révèlent des deux êtres rares emportent les hésitations : l’avant-guerre et ses appréhensions, la débâcle, l’occupation, les cartes inter-zones, le ravitaillement, a ligne de démarcation, la radio anglaise… Les souvenirs reprennent, un cortège d’ombres, la plupart souvent mentionnées, traversent les pages, Charles Du Bos, Boris de Schloezer, A. Kojève, Franz Krüger, Monique Saint-Hélier, Jeanne Delhomme, le P. d’Ouince, le P. Daniélou, le P. Teilhard de Chardin, le P. Huby, le génial, l’inénarrable Jean Wahl, et cette admirable Rachel Bespaloff, qui devait se suicider… Les vivants sont moins nombreux : le P. de Lubac, Marcel Légaut, Pierre Colin, les enfants de Gabriel Marcel…C’est une grâce de les avoir approchés, écoutés. Maintenant leurs lettres, si peu narratives cependant, ressuscitent le temps enseveli.