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L'histoire de la thérapie morale et psychologique des aliénistes et des psychologues doit bien davantage aux pratiques religieuses qu'on veut bien le croire. Quand elles s'appliquent à la souffrance des âmes, médecine et religion s'opposent-elles ? L'histoire de la folie pourrait s'écrire en retraçant la lente marche vers une " laïcisation de l'esprit " : le prêtre progressivement dépossédé de son pouvoir guérisseur par le médecin, l'âme qui tend à se fondre dans l'univers neurologique, l'inconscient qui surgit avec la psychanalyse au début du XXe siècle. Pourtant, l'étude des pratiques thérapeutiques, religieuses et laïques, incite à réviser assez largement cette vision schématique. Dans ce livre ambitieux, Hervé Guillemain révèle que la thérapie morale et psychologique des aliénistes et des psychologues doit quelque chose aux pratiques religieuses. Les techniques hypnotiques regardent ainsi du côté de l'exorcisme et la psychanalyse du côté de la confession. On sait peu, par exemple, que, dans l'entre-deux-guerres, des chrétiens jouèrent un rôle important dans la diffusion de la psychanalyse dans la société française. L'histoire des pratiques thérapeutiques de la folie et des troubles psychiques, depuis le traitement moral appliqué dans les asiles d'aliénés au XIXe siècle jusqu'aux psychothérapies modernes du XXe siècle, apparaît à certains égards comme un nouveau développement de l'histoire des directions de conscience héritées du christianisme. L'auteur montre que le savoir scientifique sur la folie et sur la conscience ne peut être, lui non plus, dissocié de la morale et des concepts religieux et qu'il faut comprendre ensemble le péché et la dégénérescence, le traitement des aliénistes et la théologie morale, la possession et l'hystérie. Il avance que, loin de s'opposer, la médecine, la psychologie et la religion font partie d'une même histoire sociale et culturelle.