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Ce numéro s’ouvre sur un essai inédit de Kant présenté et traduit par H.-S. Afeissa, « De la question de savoir si la Terre vieillit, considérée d’un point de vue physique », issu des écrits de la période précritique – l’un des plus importants qu’ait rédigés le penseur de Königsberg dans les années 1750. Appartenant au groupe des publications scientifiques de Kant, il examine la question du vieillissement de la Terre du point de vue des processus géomorphologiques qui y sont à l’oeuvre. L’essai jette un éclairage précieux sur certains aspects de la réflexion du philosophe au moment où celui-ci préparait son grand traité sur l’histoire générale de la nature et du ciel ; il révèle, dans son œuvre, la permanence d’une pensée de la destruction apocalyptique de la Terre, dont il a ultérieurement proposé une interprétation pratique dans deux écrits majeurs – La religion dans les limites de la simple raison (1793) et La fin de toutes choses (1794). Dans sa « Méditation sur le mot de Husserl “l’histoire est le fait majeur de l’être absolu” » (traduit par G. Fagniez), Ludwig Landgrebe, disciple direct de Husserl, souligne l’ancienneté, mais aussi l’inachèvement de l’interrogation husserlienne sur l’histoire. En élucidant la manière dont s’articulent, d’une part, les formes individuelles et collectives de l’histoire, d’autre part, la factualité et l’idéalité de celle-ci, il vise à dévoiler et combler une lacune qui affecte la réappropriation phénoménologique du thème métaphysique de l’unité de l’histoire – et ce en pensant le temps historique, tâche Husserl dont se serait affranchi en envisageant l’histoire d’un point de vue essentiellement pratique. Les sciences expérimentales offrent une image du monde : par les entités et processus qu’elles mentionnent, elles constituent une ontologie du monde, qui va souvent à l’encontre du sens commun. Dans « Une objectivité kaléidoscopique : construire l’image scientifique du monde », quatre spécialistes de philosophie des sciences montrent que cette tâche relève de la philosophie plutôt que de la seule science ; qu’une telle image résulte en outre de l’application d’au moins deux « modes d’objectivation », le théorique et l’expérimental ; et enfin que, diverses sciences conduisant à différentes images du monde, des conflits peuvent rendre difficile l’élaboration d’une image scientifique du monde cohérente et unifiée. Dans « “L’aptitude à la liberté”, de John Stuart Mill à Michael Walzer », Aurélie Knüfer analyse l’un des arguments consés fonder le principe de non-intervention : vu qu’il serait impossible de savoir, avant qu’il ne soit effectivement libre, si un peuple est apte à la liberté, et que seul un peuple qui se libère lui-même est susceptible de fonder ensuite des institutions libres, l’intervention pour aider des insurgés contre un gouvernement oppresseur serait toujours un mal. L’article montre les implications et les apories de cet argument dans la philosophie de John Stuart Mill, en restituant le contexte théorique et politique de son élaboration, et examine également l’usage et la critique qu’en a faits Michael Walzer. D. P. Sommaire EMMANUEL KANT De la question de savoir si la terre vieillit, considérée d’un point de vue physique. Présenté par Hicham-Stéphane Afeissa LUDWIG LANDGREBE Méditation sur le mot de Husserl : « L’histoire est le fait majeur de l’être absolu » PIERRE-ALAIN BRAILLARD, ALEXANDRE GUAY, CYRILLE IMBERT et THOMAS PRADEU Une objectivité kaléidoscopique : construire l’image scientifique du monde AURÉLIE KNÜFER « L’aptitude à la liberté » de John Stuart Mill à Michael Walzer NOTE DE LECTURE