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En 1936, pressentant le défaite du camp républicain dont il fut l'un des plus ardents défenseurs, le journaliste Manuel Chaves Nogales quitte l'Espagne pour s'installer en France. Quatre ans plus tard, cet antifasciste convaincu est douloureusement rattrapé par les blessures mal cicatrisées qu'a laissées sur lui la Guerre d'Espagne: la France capitule devant l'armée allemande. C'est dans ce contexte de débâcle générale que Chaves Nogales rédige l'"Agonie de la France", témoignage à chaud sur le Paris des connivences qui mèneront à la collaboration, sur les raisons politiques de la défaite, et, surtout, sur la mentalité d'un peuple affaibli par ses divisions internes, sans foi en lui-même et en la démocratie, incapable donc d'incarner cette dernière face à l'idéologie nazie. Du verrouillage des moeurs à l'augmentation considérable du temps de travail des ouvriers, de la politique nataliste à la recrudescence offensive de la religion catholique, l'écrivain dresse le portrait d'une -certaine - France tombée sur la tête, se réfugiant volontiers derrière l'expression de "drôle de guerre" pour justifier une insouciance coupable. N'est pas "drôle" la guerre de celui qui sacrifie sa vie pour la liberté, s'insurge l'humaniste, le même qui, armé d'un regard impitoyable, ausculte ce "monde parisien des omniprésentes marquises intellectuelles, des salons désormais réduits à des recoins capitonnés de bars américains, des clientèles d'hommes politiques médiocres, des banquiers couards et mal informés et des grands industriels somnolents". Ce monde qui oublia bien vite de jouer son rôle de prétendue "élite". Souvent comparé à l'"Étrange Défaite" de Marc Bloch, rédigé à la même période, pour la pertinence de ses analyses et l'âpreté de son constat, "L'agonie de la France" éclaire du précieux point de vue d'un étranger ce qui constitue encore le grand trauma de la mémoire française. Plaidoyer poignant, fracassante pièce à conviction, "L'agonie de la France" est aussi et surtout un hommage en creux à l'autre France, la patrie de ceux qui, à l'instar de cet intellectuel incorruptible et passionné, ont refusé de baisser les bras devant la barbarie.