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Situé à la frontière entre le droit des sociétés et le droit financier, le droit des valeurs mobilières est très certainement l'une des branches du droit ou les différences entre Common law et Civil law ont longtemps été les plus marquées. L'innovation financière nécessite en effet un cadre juridique qui soit suffisamment souple et évolutif pour permettre aux ingénieurs que sont devenus les praticiens de la finance, de créer, à partir ou en dehors des cadres juridiques existants, de nouvelles combinaisons de titres aptes à répondre aux besoins sans cesse changeants des opérateurs. En la matière, c'est vers le système de Common law que convergent tous les regards en quête de modèles car l'extraordinaire permissivité qui caractérise le droit anglo-américain des affaires permet de pousser plus loin que partout ailleurs l'effort de créativité. Si des réformes successives -notamment celle résultant de l'ordonnance n°2004-604 du 24 juin 2004- ont permis d'introduire progressivement dans notre droit la flexibilité qui lui faisait initialement défaut, la réelle liberté de création des titres qui existe désormais en France ne permet pas d'occulter les profonds bouleversements juridiques qui en ont résulté. L'idée dominante qui se dégage ici est celle d'une mise àl'épreuve du droit par la logique financière. Laissant de côté les grands principes fondateurs de notre droit des sociétés, le législateur à ouvert la voie à une diversification des titres qui, au-delà de la simple modernisation de la structure financière de la société, atteint le coeur même de son organisation interne. Aux produits standardisés et juridiquement identifiés, se sont substitués des instruments uniques, conçus "sur mesure", dont les droits ne dépendent plus de la nature des titres ni du profil de leurs porteurs. La conséquence de cette multiplication de catégories innommées d'instruments est une évolution de la notion de valeur mobilière ayant pour critère essentiel la fonction de financement de l'émetteur et pour principal rôle l'accroissement de la valeur boursière de l'entreprise. C'est toute l'étendue de l'influence du droit anglo-américain et sa conception particulièrement libérale du capital social qui se manifeste sur notre droit dessociétés. C'est aussi toute une idéologie qui apparaît derrière cette conception nouvelle du rôle économique des valeurs mobilières. Si désormais le pouvoir est revenu aux détenteurs de capitaux, l'actionnariat a changé de forme et s'est doté de moyens nouveaux d'expression. Forts des principes venus de la Corporate governance, les actionnaires institutionnels sont devenus les vecteurs privilégiés du contre-pouvoir actionnariat et participent, depuis la "post-Enronite", à l'exigence nouvelle de transparence. Quel que soit l'avenir du gouvernement d'entreprise "à la française", les bouleversements qu'a connu notre droit des sociétés sous l'influence de ce mouvement confirment pour le moins que le choix du mode de financement de la société anonyme reste intimement lié à la question de la répartition du pouvoir au sein de celle-ci et modifie nécessairement son mode de fonctionnement