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« Il n’y a pas de science qui ait été plus que l’esthétique livrée aux rêveries des métaphysiciens.Depuis Platon jusqu’aux doctrines officielles de nos jours,on a fait de l’art je ne sais quel amalgame de fantaisies quintessenciées et de mystères transcendantaux qui trouvent leur expression suprême dans la conception absolue du beau idéal, prototype immuable et divin des choses réelles. C’est contre cette ontologie chimérique que nous avons essayé de réagir ». Les premières lignes de cette <em>Esthétique</em>, publiée en 1878, donnent le ton de l’ouvrage. Redoutable polémiste – l’auteur était aussi journaliste et critique d’art – Eugène Véron conçoit la philosophie comme une arme de combat. A cette « ontologie chimérique », il oppose une approche radicalement nouvelle de l’art et de l’expérience esthétique fondée à la fois sur les travaux les plus récents des scientifiques et sur la pratique des artistes eux-mêmes – et notamment des artistes « modernes ». Cette <em>Esthétique</em> s’inscrit donc dans le courant de l’esthétique scientifique qui s’est développé à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle; mais c’est une esthétique scientifique nourrie de la connaissance intime que son auteur a du monde de l’art.