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Le titre de l’ouvrage peut paraître étrange aujourd’hui. Il ne l’était pas en 1655, car la fréquentation de la Bible était quotidienne et la prophétie de Daniel sans cesse scrutée.
Aucun prophète ne fut tant requis que Daniel. Réformateurs, utopistes, politiques, hommes de science, de Luther à Newton, sans oublier Cromwell et tant d’autres, catholiques et protestants, appelaient impatiemment de leurs voeux les temps nouveaux.
Dans ce “siècle de fer”, il revenait à Menasseh ben Israël – le plus célèbre rabbin du XVII<sup>e</sup> siècle, l’ami de Rembrandt – d’offrir l’interprétation juive de l’histoire, voire de la discuter avec audace au sein même du judaïsme. La restauration imminente du peuple de Dieu se ferait en terre d’Israël. Elle inaugurerait une nouvelle histoire dans laquelle juifs et justes non juifs du monde entier vivraient dans une heureuse concorde.
Cependant, la guerre civile ravageait l’Angleterre. Des extrémistes s’emparaient du livre de Daniel pour menacer Cromwell. Menasseh ben Israël se rendit à Londres et présenta son ouvrage au Lord Protecteur. Il y trouva non seulement de quoi faire taire ses adversaires, mais encore la possibilité de donner à l’Angleterre un rôle messianique. La Pierre glorieuse devint alors comme un passeport pour le retour des juifs chassés depuis le XIII<sup>e</sup> siècle. Ce retour fut perçu par de nombreux chrétiens comme le premier pas vers l’installation des juifs dans leur terre ancestrale.