Prix public : 25,00 €
De la pensée qui n’est plus métaphysique, Heidegger dit qu’elle est moindre que la philosophie, plus « pauvre » que celle-ci, précisément parce qu’elle ne se tient plus à la hauteur d’une pensée de la fondation et que, loin de pouvoir rendre compte d’elle-même, elle est, dans sa finitude et son essence provisoire, tout entière au service de ce à quoi elle répond, à savoir l’événement même de l’être. Ce à quoi une telle pensée donne congé, c’est en effet à la structure onto-théo-logique du discours métaphysique de la fondation, au profit de ce que Heidegger nomme, dans son dernier séminaire, une « phénoménologie de l’inapparent ». On ne peut guère s’autoriser de cette expression pour arguer, comme on l’a fait déjà bien des fois, d’une dérive vers la poétique ou la mystique de la pensée heideggérienne. Car cet « inapparent » ne renvoie à aucun « arrière-monde », mais seulement à cette inapparence qui réside en tout apparaître, à cet « être » de l’étant que la « philosophie » au sens traditionnel de ce terme n’est parvenu à penser que sous la figure « étante » du fondement. C’est dire que ce que Heidegger nomme « fin de la philosophie » ne signifie nullement son anéantissement, mais ouvre au contraire la possibilité d’une appropriation plus authentique de ce qui a été en question depuis le départ en elle. A la fin de la Lettre sur l’humanisme, Heidegger déclarait : « La pensée à venir ne sera plus philosophie, parce qu’elle pensera plus originellement que la métaphysique, mot qui désigne la même chose ». C’est de cette pensée plus originelle, telle que Heidegger n’a cessé d’en préparer la venue depuis les années trente, dont il est question dans les essais réunis dans ce recueil.