Prix public : 49,00 €
Le célibat et les célibataires sont mal vus dans le monde islamique depuis toujours. Pourquoi?
Cette question est liée, on s’en doute moins, à l’institution de la polygamie, la vie sexuelle de Muḥammad et les « houris » du Paradis. La raison dernière de toutes ces singularités est une doctrine qui a prévalu des origines jusqu’à nos jours, selon laquelle tout individu des deux sexes a une mission à remplir, qui fait partie de ses devoirs de croyant, qui est : se marier et engendrer une descendance. Toutefois, au tournant du III<sup>e</sup> /IX<sup>e</sup> siècle, Šāfi‘ī (m. 204/820) a apporté une inflexion à cette doctrine : les individus qui ne ressentent pas le besoin d’une vie conjugale peuvent s’abstenir de mariage à condition de se consacrer au service de Dieu. La propagation et l’adhésion à cette innovation coïncident dans le temps avec l’émergence du corps des oulémas comme seul détenteur du pouvoir légitime d’interpréter la Loi. Simultanément, les oulémas, alliés aux renonçants, définissent un idéal éthique – la maîtrise de la concupiscence. Il ne s’agit ni de jeter l’opprobre sur la sexualité, ni d’exalter l’abstinence sexuelle, mais de souligner la prééminence de la « raison » (‘aql) : l’homme conforme à cet idéal est celui qui se soumet à cette dernière, non à ses appétits. Il peut être aussi bien marié que célibataire. Aussi on peut comprendre pourquoi, alors que le natalisme est la seule politique officielle en direction de la masse des fidèles, il y a si peu de célibataires, y compris parmi les soufis.
En se donnant pour but de comprendre la casuistique qui a pour objet le célibat, cette recherche dévoile l’ensemble du faisceau des questions constitutives de la conception islamique de la sexualité.