Prix public : 22,00 €
L'anthropologie tente fréquemment d'évacuer le cannibalisme en niant sa pertinence d'un point de vue théorique, voire en contestant la réalité historique de l'acte (qui se réduirait à un fantasme de colons malveillants). Mais alors, comment expliquer que cette discipline n'a jamais produit de discours capable de dissoudre le mépris et la hargne suscités par l'évocation d'une anthropophagie exotique ? Comment comprendre cette phobie dans la civilisation occidentale ? Refuser l'anthropophagie ne suffit pas pour accéder au titre de « civilisé » ; en revanche, il suffit d'être cannibale pour se voir exclu de ce monde-là et qualifié de « primitif ». On attribue alors le fait de manger des hommes à des mobiles réducteurs : la faim ou la religion. En soulignant les permanences des récits rapportés par les missionnaires et les explorateurs depuis Christophe Colomb et Marco Polo, se dessine une épistémologie portant sur le rapport entre la culture des gens observés et celle des observateurs. De même, l'auteur met en parallèle des débats du xixe siècle au sein de la Société d'anthropologie de Paris et les controverses parfois sanglantes qui agitent les anthropologues américains à la fin des années 1970. Ce livre répond à la fois à la volonté de constituer le cannibalisme en véritable sujet anthropologique et à celle de prendre position contre l'ethnocentrisme et le mépris du « sauvage » dans les sciences sociales.