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En 1932 puis en 1947, au cours de deux famines, une vague de désordres, de vols de grains dans les champs et d'attaques de trains inquiéta le gouvernement de l'Union soviétique. En réponse, Staline décida de punir les voleurs de la « propriété publique », considérés comme des ennemis du peuple. À sa mort en 1953, alors que le Goulag atteignait ses taux d'enfermement les plus élevés (3 à 4 % de la population), la moitié des détenus des camps avait été condamnée pour vol.<br>Juliette Cadiot explore cette criminalité économique dans l'URSS stalinienne au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Elle s'intéresse à des infractions particulières, les « vols de la propriété socialiste », et à la répression féroce menée par le pouvoir stalinien contre ces délits. En puisant anecdotes et tranches de vie dans les archives judiciaires russes et ukrainiennes récemment ouvertes, l'auteure propose une esquisse saisissante de la condition matérielle des Soviétiques, qui reposait sur la nécessité de voler pour survivre, quelle que soit leur position sociale. À travers une histoire des concepts, du droit et de la pénalité, elle souligne ainsi que le vol de la propriété d'État, du peuple tout entier, a façonné les relations sociales entre Soviétiques, les unissant dans un système parallèle d'échanges et de solidarité, une « société des voleurs ».