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Que nous apprend la vie publique urbaine de notre culture morale et politique ? Comment perçoit-on les autres, et comment définit-on, dans l’espace limité des rencontres auxquelles nous expose le côtoiement urbain le plus routinier, le périmètre de ce que l’on doit à autrui, ce que l’on peut en attendre, en craindre ou en exiger ? Des métamorphoses de la mendicité à la politisation du phénomène de « harcèlement de rue », l’étude des « relations en public » chère au sociologue américain Erving Goffman est ici prolongée, pour analyser la façon dont les formes ordinaires de la coexistence urbaine participent à la fabrique de nos cultures démocratiques. L’ethnographie de longue durée menée par Carole Gayet-Viaud montre, au fil des séquences d’enquête, mêlant observations des espaces publics urbains (rues, transports, jardins, terrasses de café, etc.) et entretiens relatifs à ces expériences, le travail normatif à l’œuvre dans ces échanges. La définition des choses dues entre inconnus, telles que la vie publique les donne à voir, dessine ainsi une civilité irréductible à un corpus de règles qu’il ne s’agirait que d’appliquer. C’est, bien plutôt, une activité permanente de réglage des conduites, qui inscrit, dans des pratiques d’apparence anodine, aux frontières des sphères morale et politique, une définition située des exigences de la vie commune, des égards qui articulent un sens du juste et du convenable, et tentent de les faire coïncider.