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Au nombre de quelques dizaines de milliers, les Dìì occupent une centaine de villages qui sont autant de chefferies de tailles variables, voire minuscules, dans un territoire situé au nord du Cameroun. Comment fonctionne précisément ce système politique, et quelles en sont les justifications aux yeux des intéressés? Dans un premier temps, Jean-Claude Muller présente l'organisation socio-politique et les divers lignages nécessaires à la bonne marche d'une chefferie (lignage du chef, du circonciseur, du « maître du territoire », du forgeron) et leur intégration dans un ensemble social et rituel. Puis il analyse des mythes de fondation qui se réfèrent au schème du don et contre-don de Marcel Mauss, la chefferie étant créée pour récompenser un chasseur étranger ayant offert son gibier aux autochtones. Ceux-ci lui donnent la chefferie pour qu'il continue à faire bénéficier la communauté de ses bienfaits. Des rites sont alors chargés de faire du chef une sorte de surhomme, doté d'un double féminin, un masque qu'il est seul à porter et qui fait écho aux autres conceptions de la personne physique du chef de quelques populations voisines. Par la suite, l'auteur examine les répercussions des trois colonialismes qui ont affecté les Dìì, celui des Peuls au 19e siècle et ceux des Allemands et des Français au 20e siècle. Aujourd'hui, après l'arrivée de l'islam et du christianisme, les Dìì se disent tous soit chrétiens soit musulmans. Leur dilemme consiste à décider ce qu'ils peuvent garder de leurs rites traditionnels, afin de ne plus passer pour des païens. Ouvrage d'anthropologie politique, il montre aussi les mécanismes qui empêchent le pouvoir « cheffal »de se muer en despotisme. Il fait voir également comment un peuple africain contemporain maintient ses traditions tout en les adaptant au cadre étatique actuel, en proposant de nouvelles solutions administratives.