Prix public : 85,00 €
Figure obsédante de l’imaginaire collectif, le fou a longtemps été chargé de significations qui le dépassent ; le mythe de la folie fait recette sur la scène littéraire mais les malades n’en sont que des figurants. Alors que le fou réel est maintenu dans les marges de la littérature comme de la société, le fantasme culturel de la folie est nourri et modelé au XIXe siècle par la littérature romantique ou fantastique, et exalté au début du siècle suivant par les avant-gardes historiques. Un certain nombre de textes de romanciers du XXe siècle, parmi lesquels Georges Duhamel, André Baillon, Julien Green, Henry de Montherlant ou encore Alexandre Vialatte, mettent au contraire en oeuvre un décentrement du regard littéraire de la folie vers le fou – du mythe à l’individu. Ce sont les modalités et les logiques de cette émancipation de la figure du fou et de son affirmation comme sujet autonome – au sens de thème comme de subjectivité – dans l’espace romanesque que ce travail s’applique à éclairer. Ces récits fictionnels qui font de la conscience aliénée à la fois le foyer et l’objet principal de la narration mettent en scène une folie presque familière, où l’idéalisation cède le pas à la représentation de troubles intimes et ordinaires, qui atteignent un personnage banal menant une existence modeste. Par leurs affinités sémantiques, syntaxiques et pragmatiques, ils forment un « sous-genre » romanesque, celui des histoires de fous. L’enjeu de cet ouvrage est de déterminer le répertoire générique de ces romans tout en examinant la manière dont la folie interroge les moyens et les pouvoirs de la fiction romanesque. Il s’agit également de mettre au jour ce que la littérature nous aide à comprendre de cet impensable, envers de l’expérience partagée de la raison, et d’observer comment les romanciers contribuent à refléter tout autant qu’à remodeler les formes de cet objet social et culturel.