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« Quand on aime la poésie, au bout d’un certain temps, la seule façon tolérable d’en parler, c’est d’en parler avec précision, quels que soient les risques. Tout finit par valoir mieux que la Tour de Babel assourdissante où, comme à la corbeille d’une Bourse étrange, sont chaque jour hurlées péremptoirement toutes les opinions sur la Poésie majuscule. Pourquoi “glorieuse dans les bras du soleil” ? Là aussi, on voit avant de comprendre – il faut voir avant de comprendre et se laisser mener par les mots vers l’image. Une image de femme portée dans les bras du soleil, une vision de rayons divergents, de bras tendus offrants. C’est une image glorieuse, comme dans les tableaux celle des personnages entourés de lumière. C’est seulement l’image radieuse de femme éblouissante qui a empli les yeux d’Éluard. Et la preuve, c’est qu’il revient sur cette image, insatisfait jusqu’à ce qu’elle ait atteint la plénitude expressive adéquate à la vision qu’il gardait intérieurement : Sans songer à d’autres soleils Que celui qui brille en mes bras dira-t-il en 1940. Et c’est bien la même image. Il me semble qu’il a finalement su se délivrer de son éblouissement dans ce vers-ci, le plus accompli : Tu portes dans tes bras les branches du soleil. » Réédition de textes parus en 1993 dans la revue Agone (et pour la première fois entre 1952 et 1958) dans Les Cahiers du Sud), ces quinze chroniques parcourent les écrits de Guillaume Apollinaire, Louis Aragon, André Breton, René Char, François Dodat, Paul Éluard, Nazim Hikmet, Victor Hugo, Stéphane Mallarmé, Henry de Montherlant, Saint-Pol Roux, Gaston Puel, Eugène Guillevic, Pierre Reverdy, Jules Supervielle, Paul Valéry, Alfred de Vigny, etc. Ces leçons de précision poétique sont suivies d’un dialogue entre un poète et une traductrice, qui reviennent, un demi-siècle plus tard, sur la poésie vue par le linguiste et sémiologue, militant communiste et résistant Louis Leboucher, dit Georges Mounin (1910–1993).